La pandémie nuira-t-elle à l’intégration de l’IA dans les PME?

La pandémie nuira-t-elle à l’intégration de l’IA dans les PME?

Pendant que les coffres de l’État se vident pour soutenir les chômeurs, le système de santé, l’éducation et les entreprises en confinement, on peut se demander si les entrepreneurs auront le réflexe de faire une demande de subvention afin d’améliorer leurs processus avec l’intelligence artificielle (IA).  

C’est aujourd’hui le dépôt des demandes de subventions qui entame la 2e année des programmes d’innovation pour accélérer l’intégration de l’IA dans nos entreprises (65 M$ sur 5 ans) dans le but de stimuler la productivité et la compétitivité. Mais le “remède” IA sera-t-il considéré par les entrepreneurs en dehors des secteurs technologiques comme le souhaite le gouvernement? D’autant plus qu’une entreprise subventionnée doit couvrir 70 % des dépenses admissibles et jusqu’à 50 % des dépenses totales de son projet. 

Pour Serge Beauchemin, PDG d’Anges Québec Capital, il est clair que :  

« les PME qui sont affectées par la pandémie sont en mode survie et n’ont pas vraiment la tête à aller chercher un programme de subvention axé sur l’IA en ce moment.» –  Serge Beauchemin

« Les entreprises de 20 employés et moins (85 % des PME en 2019) des secteurs les plus touchés sont plutôt préoccupées par trois choses : assurer les créances, garder le personnel et maintenir le service à la clientèle », renchérit-il. 

L’ancien dragon discute chaque jour avec des entrepreneurs grâce à sa communauté en ligne Alias Entrepreneur.e. Il affirme, par ailleurs, que les autres PME « plus proche du M que du P » pourraient utiliser l’accalmie de la pandémie pour affiner leur processus. 

 « Les plus grosses PME vont en profiter pour travailler sur leurs ventes en ligne, aller vers la numérisation et l’automatisation. N’oublions pas, dit-il, qu’une partie de l’économie est impactée positivement par la pandémie. Les entreprises manufacturières de sports, de plein air, de VTT, par exemple, pourraient se donner des avantages concurrentiels avec l’IA. »  

EXEMPLE À SUIVRE

À Laval, trois entreprises ont reçu 540 000$ pour des projets d’intelligence artificielle en 2020 dans le cadre d’un appel à projets. L’une d’entre elles, Progranova, n’a pas hésité à demander du financement pour développer son projet d’IA. Un modèle que le ministère de l’Économie et de l’Innovation (MEI) aimerait pouvoir multiplier.

Le directeur – IA, mégadonnées et infonuagique chez Progranova, Francois Théroux, admet que la pandémie peut empêcher certaines entreprises d’investir dans l’IA. Les réticences s’expliquent, selon lui, par impossibilité de travailler à distance, la complexité des solutions numériques ou tout simplement par manque de liquidité.  

« Les entreprises manufacturières ou en commerce de détail auraient intérêt à s’associer à des compagnies en transformation numérique comme la nôtre pour monter des demandes de subvention et développer de nouvelles technologies. » –  François Théroux, Progranova

Il constate que plusieurs compagnies en technologie cherchent à développer des projets innovants, mais n’ont pas nécessairement une vision claire de tous les marchés. Selon lui, un partenariat peut s’avérer gagnant-gagnant, dans les circonstances.  

Et c’est là que des accélérateurs de croissance, comme les organismes Laval Innov ou Prompt, entrent en jeu! C’est Prompt qui a aidé son entreprise à formaliser le bon partenariat et à soumettre une demande de financement qui répondrait aux critères de sélection du MEI.   

Image évoquant les graphes de connaissance

Photo : pexels

Par la suite, l’entreprise lavalloise s’est associée avec Conova, une entreprise spécialisée dans les graphes de connaissance, et avec Polytechnique Montréal pour toucher une subvention totale de 300 000$. Polytechnique (comme les autres centres de recherche d’ici) donne un accès à la technologie de pointe tout en protégeant la propriété intellectuelle.

À terme, leur projet RH de coaching intelligent soutiendra le développement des talents au sein des entreprises et favorisera la rétention de ceux-ci.   

Comment? – En colligeant toutes les données de l’entreprise pour bâtir des graphes de connaissance. Les clients de Progranova et Conova (de grandes banques avec des milliers d’employés, par exemple) pourront identifier automatiquement les compétences et intérêts de leurs employés à l’aide d’algorithmes d’intelligence artificielle. Tout ça dans l’objectif de mieux embaucher, valider et faire progresser les employés au sein de la même entreprise.  

Comme Progranova, les PME sauront-elles profiter de la perche tendue par le gouvernement Legault pour faire le grand saut et investir en IA, malgré la pandémie?  

Nous sommes loin de la coupe aux lèvres, si l’on se fie à l’enquête de Novipro réalisée en 2018. Elle indiquait, avant la pandémie, que 23% des moyennes et grandes entreprises québécoises envisageait des dépenses en IA contre 66% des entreprises américaines.  

Tout un défi à relever, mais qui commence par la connaissance des programmes d’aide à la disposition des entreprises et par des exemples concrets prouvant la rentabilité de l’IA dans le respect de la vie privée et de la sécurité des données.

À suivre !