DU SOLEIL EN TUBES GRÂCE À L’IA

DU SOLEIL EN TUBES GRÂCE À L’IA

La demande en production locale de qualité n’a jamais été aussi présente dans l’esprit des consommateurs comme de l’industrie. Tout le monde veut manger des fraises, en hiver, qui ont du goût et qui viennent du producteur du coin. Sauf que cela est impossible. A moins d’apporter le soleil du Mexique sous une serre enneigée. Utopique ? Plus vraiment.

Comment avoir du soleil en pleine nuit ? Cette demande peut paraître loufoque ou à la rigueur poétique, dans tous les cas utopique. Autant que de demander à des maraîchers québécois de produire des tomates comme en Sicile. Pourtant ce sont ces deux envies folles qui ont donné naissance à la start-up Sollum Technologies. Cette entreprise a créé une technologie d’éclairage DEL qui reproduit 99% du spectre d’un éclairage naturel, du lever au coucher du soleil. Grâce à l’Intelligence Artificielle, il est possible de reproduire le soleil de Sicile dans une serre québécoise. Et le tout en consommant moins d’énergie que les systèmes de lampes à vapeur de sodium, utilisés actuellement par les serriculteurs.

La technologie de lumière “intelligente” de Sollum repose sur des algorithmes qui modifient l’intensité des diodes électroluminescentes (DEL), offrant aux serres une solution de rechange aux éclairages à spectre fixe. À la différence des lampes qui ne produisent qu’un seul type de lumière, le système de Sollum est programmable. Le serriculteur peut programmer le cycle solaire idéal pour le type de plante qu’il veut cultiver, que ce soit un citron brésilien ou une tomate sicilienne. « Nous sommes capables de proposer à un agronome d’avoir le soleil de l’île d’Orléans au mois de juillet, pour faire pousser des fraises au mois de janvier », donne en exemple Louis Brun, président-directeur général de l’entreprise.

Avoir du soleil la nuit

Comme de nombreuses start-ups, tout a commencé dans la chambre d’un étudiant qui cherchait une solution à un problème inusité. François Moisan, l’ingénieur à l’origine du projet, devait analyser les caractéristiques d’un panneau solaire dans le cadre d’un projet scolaire. En retard sur son projet d’étude à l’ÉTS, il se voit obligé de travailler le soir, sans soleil. Mais comment avoir du soleil la nuit? François Moisan décide alors d’en créer un chez lui. Il achète des lampes DEL et réussi tant bien que mal à recréer l’ensemble du spectre lumineux. Trois ans et de bonnes rencontres plus tard, son innovation est devenue le coeur de l’entreprise Sollum, qui ambitionne de révolutionner le monde de l’éclairage, au bénéfice de tous les êtres vivants.

Car au départ du projet, ses fondateurs ambitionnaient de le commercialiser à destination des musées. Leur système permet d’éclairer des oeuvres d’art de manière optimale, sans la chaleur et les rayons dommageables du soleil. Mais face à l’importante demande en autosuffisance alimentaire, ils se sont tournés vers l’agriculture. Un marché qui croit d’années en années, selon Louis Brun : « Chaque année, il y a l’équivalent de 1000 terrains de football de serres qui sont construites et qui ont besoin d’une lumière naturelle pour atteindre leur plein potentiel de productivité et de qualité. »

S’inspirer de la nature

Pour s’adapter au monde de la serriculture, les ingénieurs de Sollum ont adopté une approche biomimétique. Après tout, les plantes ont mis des millions d’années à trouver la recette gagnante pour tirer le maximum d’énergie du soleil, autant profiter de leur expérience explique Louis Brun : « Aujourd’hui, l’industrie a une approche scientifique. Des spécialistes vont par exemple dire que le rouge et le bleu favorisent la photosynthèse, donc c’est ce qu’ils vont mettre dans la lumière. Nous, on profite des milliers d’années de recherche et développement de dame Nature. »

Avec la crise liée à la pandémie de Covid-19 et la demande de plus en plus forte d’une agriculture autosuffisante. La jeune pousse en IA a pu bénéficier d’un coup de pouce du gouvernement de Québec pour soutenir la mise en place de son innovation. Le 1er juin dernier, Investissement Québec a décidé de verser 1 M$ à Sollum Technologies pour la mise en marché d’une solution d’éclairage intelligent pour les agriculteurs, les horticulteurs et les fermes verticales. De quoi réaliser l’utopie d’un soleil sicilien à Montréal et de fraises en hiver.

Crédit Photo : O’Citrus