Les banques : Au-delà des chatbots

Les banques : Au-delà des chatbots

Les agents conversationnels, dits “chatbots” sont désormais monnaie courante sur les sites web de nombreuses entreprises. Encore grands favoris des institutions financières, ceux-ci font partie d’un large éventail de services regroupés sous une approche en intelligence artificielle qualifiée de “traitement du langage naturel”. Décryptage de l’utilisation de l’IA dans les banques.

Les banques investissent de plus en plus dans ces programmes voués à l’analyse de sentiments, la méga-recherche et la prévention de fraude. Un marché potentiel de 16 milliards de dollars en 2021, selon Accenture

Tout savoir

“Les analystes financiers se décrivent souvent comme des professionnels qui doivent tout savoir à propos d’un sujet. Mais qu’est-ce que ça veut dire de tout connaître à propos d’un sujet?” demande Foteini Agrafioti, co-fondatrice et directrice de Borealis AI, le département en intelligence de la Banque Royale du Canada avec quatre branches situées à Montréal, Toronto, Vancouver et Waterloo. Une centaine d’experts sont répartis dans ces quatre branches, avec le bureau montréalais particulièrement spécialisé en traitement du langage naturel. 

“En tant qu’être humain nous sommes limitées par le nombre de langues que nous parlons, du temps que nous avons devant nous, et de facteurs potentiels comme la fatigue accumulée… 

Le traitement du langage naturel permettrait donc de filtrer à travers la masse impressionnante et parfois redondante de contenu relié à la banque, afin de permettre à l’analyste de prioriser les informations les plus pertinentes. 

Analyser l’information

À la Banque Nationale du Canada, ils seraient une quarantaine d’experts en sciences des données répartis sur trois équipes d’intelligence artificielle. Éric Charton, directeur principal, Intelligence artificielle à la Banque Nationale, a participé à la formation de ces équipes. “Quand on a monté ce groupe,” explique-t-il, “c’était pour améliorer l’expérience client, rendre le travail des collaborateurs plus agréables ou confortables, et aussi de rendre les processus internes plus efficaces.” 

“On utilise beaucoup de l’apprentissage profond et BERT en particulier (ndlr: modèle de langage développé par Google) afin d’analyser et classifier le retour d’information du client.” Sur le marché, on retrouve également Amazon Comprehend et Microsoft LUIS (Language Understanding Intelligence Service). 

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La gestion du data, accumulé mais rarement classé de façon optimale, intéresse beaucoup le milieu bancaire, ouvert aux possibilités qu’offrent ces outils de plus en plus sophistiqués d’analyse du langage. “On vise aussi les processus d’opérations, les processus financiers, comptables,” détaille Éric Charton. “Ce n’est pas uniquement en direction du client.” 

La banque américaine JP Morgan Chase a dépensé 11,4 milliards de dollars dans son budget techno en 2019. Sans publier ses résultats, celle-ci affirme que son programme COIN (Contract Intelligence) soutient ainsi le département légal. Il s’agirait de 360 000 heures économisées en matière de lecture de documents.

Prédire

Selon une étude soutenue par IBM, En 2019, 75% des brèches au sein d’institutions financières provenaient de l’intérieur, une augmentation de 47% face à l’année précédente. Toujours selon cette étude, ces incidents feraient perdre 11,45 millions de dollars par an en moyenne aux entreprises visées, et 62% de ces dommages seraient dûs à la négligence des employés. Des outils d’analyse du langage permettraient de détecter et prévenir ces incidents. 

En 2018, la Banque Royale du Canada planifiait des dépenses de 3,2 milliards $ en nouvelles technologies, 40% de ce budget étant alloué au blockchain et à l’intelligence artificielle, selon BNN Bloomberg

En décembre 2019, l’institution financière cherchait à breveter une technologie permettant de prédire l’arrivée d’un achat majeur de la part d’un client. Selon le Financial Times, le brevet affirme que “l’historique du client nuit à la mémoire à long terme des programmes actuels.” 

Un des outils déjà déployés par la RBC enregistre les transactions réalisées par un.e cliente et l’avertit en cas d’une anomalie dans les habitudes dépensières. Ce type d’outil peut également analyser la tolérance aux risques des clients et ainsi proposer des scénarios d’épargne ou d’investissement en fonction de ce profil. 

Covid-19

La Banque Royale du Canada adapte également ses offres en fonction de la Covid-19, sachant que de nombreux restaurateurs et entrepreneurs ont connu des aléas considérables. 

“Quand tout tombe à zéro, on a affaire à une nouvelle réalité. Mais ça ne veut pas dire que tout doit s’arrêter,” explique Foteini Agrafioti directrice de Borealis AI. “Avec l’aide de l’apprentissage machine, des modèles de crédit et des évaluations de risques, on peut aller de l’avant afin de permettre à des clients d’avoir accès à des fonds.”