Un robot-chien, meilleur ami des ouvriers ?

Un robot-chien, meilleur ami des ouvriers ?

Un drôle de chien robotisé travaille aux côtés des ouvriers sur un chantier de la Rive-Sud de Montréal. Cscience IA a voulu en savoir plus sur ce canidé particulier dopé aux nouvelles technologies.

Son nom est Spot. Ce robot quadrupède vous fait étrangement penser au robot tueur dans la série Black Mirror ? À croire que ses concepteurs chez Boston Dynamics s’en sont inspirés pour créer ce robot-chien, entièrement automatisé, capable de monter des escaliers, ouvrir une porte et parcourir des chemins accidentés.

Depuis le mois de janvier, il opère sur un chantier du géant de la construction, Pomerleau à Montréal. « Pour l’instant, nous l’utilisons pour prendre des photos à 360°. Grâce à ses photos, Spot nous permet de surveiller l’évolution du chantier à distance, de faire le suivi du respect du budget et de l’échéancier”, explique Isaac Charbonneau Beaulieu, gérant en innovation chez Pomerleau.

TOTALEMENT AUTONOME

Spot sait s’arrêter avant de foncer dans un mur ou encore passer au-dessus d’objets au sol. « Ce qui est intéressant, c’est que l’on peut lui faire enregistrer des parcours. On lui fait faire plusieurs parcours sur le chantier, il les enregistre et les prochaines fois nous allons juste lui indiquer le point de départ et il va être capable de partir tout seul, d’être autonome. Si les conditions de chantier ont changé, « quelqu’un a par exemple déposé une palette de matériel en plein milieu de son chemin, il va faire le tour, il va s’arranger pour éviter l’obstacle ou passer au-dessus. Il peut toujours se réajuster aux conditions ».

Le robot est tout de même surveillé à distance. « On a accès aux caméras qui sont montées sur Spot, si on voit qu’il y a un problème, on peut « tuer » le robot, on peut le contrôler à distance », rajoute Isaac Charbonneau Beaulieu.

UN JUMEAU NUMÉRIQUE

Spot est doté de plusieurs caméras dont une caméra HD à 360° fixée sur son dos. Les photos qu’il prend lors de son parcours servent à renseigner le « jumeau numérique », c’est-à-dire, la maquette du bâtiment en construction. La caméra est en effet reliée à une plateforme de documentation qui permet de faire des comparaisons avec des logiciels de conception et de construction virtuelles. Ce qui permet ainsi, une vue complète du site à partir d’une connexion à distance. 

Cela peut, en autres, permettre aux clients de suivre les travaux « sans visiter un environnement dangereux », précise l’expert de chez Pomerleau.

De plus, ce que fait le robot sur le chantier, « c’est une activité que l’on faisait faire à un employé. Avec moins de gens en chantier, on diminue les risques, les accidents sont plus faibles. Davantage d’actualité depuis le début de la Covid », rajoute-t-il.

SPOT EST-IL PLUS EFFICACE QUE L’HUMAIN ?

Pour cette entreprise, il s’agit surtout d’un gain de temps et de rendre le travail plus intéressant pour les employés. « La tâche de Spot, ce sont des commis de chantier ou des stagiaires en ingénierie qui en ont la charge. On a un gros problème de main d’oeuvre au Québec, on veut donc essayer de fournir un travail plus attractif aux employés que de seulement devoir se rendre sur un chantier et prendre des photos. C’est une tâche qui n’a pas de valeur ajoutée. C’est quelque chose qu’un robot peut faire sans problème, ça ne demande aucun jugement pour faire cela. Mais il n’est absolument pas question de remplacer ces employés ».

TRANSFORMER LA CONSTRUCTION SUR LES CHANTIERS

À plus long terme, cela pourrait même transformer la construction sur les chantiers, d’après Pomerleau. « On pourra notamment préfabriquer des choses comme les murs en usine. La préfabrication va permettre d’avoir quelque chose de meilleure qualité, de la bonne taille. Nous sommes gagnants, car on s’assure que ça va fonctionner avant l’arrivée en chantier. On ne perdra pas de temps à devoir tout modifier et recommencer », prévoit Isaac Charbonneau Beaulieu.

Un enthousiasme, qui n’est pas partagé par tout le monde. « Je dois vous avouer que les choses fabriquées en usine, ce n’est pas la chose qui me fait le plus plaisir », confie Philippe Lapointe, conseiller aux communications à la Fédération des Travailleurs et Travailleuses du Québec (FTQ Construction). « Ça, c’est certain que ça remplace l’humain ».

Un “Projet pilote” sous surveillance

Invité par Pomerleau à visiter le site à l’arrivée de Spot, le syndicat « avait surtout des inquiétudes concernant le traitement des données. Nous voulions nous assurer que ce ne soit pas comme une caméra mobile qui soit en permanence en train de surveiller les travailleurs et travailleuses, ce qui est complètement proscrit dans la « Charte québécoise » des droits et libertés des individus. On nous a répondu que le robot disposait d’une technologie de brouillage des visages ».

« Pour l’instant, nous sommes comme Pomerleau, on apprivoise les nouvelles technologies d’IA. Concrètement, notre attitude est de suivre le développement de son utilisation  jusqu’à constater un débordement. Il y a continuellement des nouvelles technologies qui apparaissent sur les chantiers, on ne peut pas aller à l’encontre de leurs développements, mais il faut que ça se fasse dans le respect des travailleurs et travailleuses », insiste Philippe Lapointe.

Au stade de « projet pilote », le robot devrait rester sur le chantier de la Rive-Sud encore trois mois.

Et sachez que si vous désirez faire l’acquisition d’un Spot, il est désormais disponible à l’achat pour le grand public. Son prix n’est pas pour toutes les bourses : 74 500 US$.