Devenir spécialiste de données en quelques semaines

Devenir spécialiste de données en quelques semaines

Vous rêvez de démarrer une carrière en technologie, décrocher un emploi prometteur ou lancer votre entreprise? Saviez-vous que des formations courtes en science des données permettent de se requalifier en quelques semaines sans prérequis universitaires? Ces formations intensives et immersives suivent la formule éprouvée des Bootcamps de codage.

À QUOI S’ATTENDRE?

On s’en doute, les journées dans un bootcamp en science de données sont bien remplies. Le matin, les apprenants suivent les cours théoriques en direct sur des plateformes comme Zoom. Puis, ils s’affairent à relever des défis de programmation avec un camarade sur une plateforme telle que Compass. À la fin de la journée, une session récapitulative vise à consolider les notions.

L’enseignement est réalisé 100% en ligne depuis la pandémie. Des plateformes comme Slack ou Discord sont utilisées pour favoriser une ambiance de classe et pour offrir l’assistance personnalisée de pédagogues, malgré la distance.

Les cours sont livrés par des formateurs ayant une expérience de l’industrie. Et chaque école vous dira qu’ils embauchent les professeurs les plus compétents et passionnés 😊.

À la fin de la formation courte, l’étudiant devrait comprendre l’essentiel de Python, de l’apprentissage profond, de l’apprentissage-machine, des réseaux neuronaux et de la visualisation des données, mais sans plus.

Il ou elle aura aussi appris à explorer, nettoyer et transformer les données exploitables, et à mettre en œuvre des modèles d’apprentissage automatique dans un environnement de production. L’idée est de développer une mentalité de croissance pour qu’ils continuent à être ouverts et curieux (growth mindset).

« En sortant de la formation, nos étudiants sont débutants et ils continuent d’apprendre en emploi » – Cassie Rhéaume, Responsable des partenariats stratégiques chez Lighthouse Labs.

Qui dit peu de temps, dit aussi beaucoup de matière à assimiler. La présence aux sessions en ligne est obligatoire.

« C’est certain qu’il faut pouvoir s’engager. On ne peut pas le faire en dilettante » – Ines Alvergne, Marketing & Event manager chez Le Wagon Montréal.

QUELQUES ÉCOLES ”LOCALES”

Le Wagon Montréal se donne sur 9 semaines intensives de 9h à 18h ou sur 24 semaines à temps partiel à raison de deux soirs par semaine plus les samedis.

« Notre programme s’adresse aux personnes visant des carrières de data analyste, data ingénieur ou scientifique des données. La matière couverte est équivalente à une année en programme universitaire du premier cycle, en version plus pratique. Nos étudiants apprécient le curriculum qui est à jour. Nous donnons accès aux outils de la plateforme Slack à vie sans frais contrairement aux autres bootcamps », précise Marie-Gabrielle Ayoub, cofondatrice du Wagon à Montréal.

Fondée en 2013, Lighthouse Labs ciblait au départ le marché des femmes désireuses de se réorienter dans le secteur scientifique. On y retrouve une formation intensive de 12 semaines en science des données ou une formule sur 30 semaines pour répondre aux besoins des gens ayant des obligations.

« La denrée la plus rare, c’est le temps, affirme Cassie Rhéaume, responsable des partenariats stratégiques chez Lighthouse Labs. Il y a un réel besoin pour des formations courtes et ciblées où l’étudiant peut rester en contrôle de son environnement. »

La troisième école que nous avons rejointe, SKEMA, cible surtout les cadres en entreprise qui ont les moyens de s’inscrire à une formation d’appoint ou dont les frais sont remboursés par l’employeur. Quels que soit les métiers, l’idée c’est d’ajouter un volet IA compétences non techniques des dirigeants (soft skills).

La formation aide à avoir une meilleure connaissance du rôle de l’IA dans la stratégie d’entreprise, la prise de décision d’un cadre, la chaîne d’approvisionnement, en marketing avec des données ouvertes ou des données spécifiques, etc.

« Lorsqu’elles affichent des offres d’emploi dans le domaine de l’IA, fait remarquer Catherine Feuillet, directrice du développement chez SKEMA, beaucoup d’entreprises ont des exigences pratiquement impossibles à combler. »

On demande, par exemple, un doctorat en science des données, cinq années d’expérience en intelligence artificielle, des compétences en gestion de projet et une maîtrise en administration des affaires. Une entreprise pas besoin d’embaucher des Ph. D. en science des données pour expérimenter avec l’IA, selon elle.

« Des employés curieux peuvent aussi trouver des moyens de résoudre des problèmes par eux-mêmes s’ils ont accès à des activités de formation ou de perfectionnement. » – Catherine Feuillet, directrice du développement chez SKEMA AI.

Notez que les formations ci-dessus sont données en anglais.

ADMISSION

Le bon côté des formations courtes en institutions privées réside souvent dans l’accessibilité. Contrairement aux universités, on n’exige pas de diplôme préalable. Un frein important pour certains travailleurs et pour les jeunes adultes.

« Avec la pandémie, on remarque que 14% de nos étudiants viennent d’un parcours artistique, souligne Cassie Rhéaume, c’est une occasion d’explorer de nouveaux horizons ».

La majorité des écoles de formation courte demandent toutefois un minimum de connaissance en programmation et une base en mathématique équivalente au niveau collégial. La connaissance des fonctions ainsi que des notions de statistiques et de probabilités facilitent la réussite.

Cela étant dit, elles offrent aussi un travail préparatoire avant le début du bootcamp. Il est recommandé de s’inscrire 4 à 10 semaines à l’avance pour mieux se préparer avec des visionnements LinkedIn, YouTube ou avec le matériel fourni par l’école. C’est aussi une façon d’organiser sa vie et de libérer son agenda avant d’entreprendre une formation intensive.

Et, qui sait, peut-être de changer d’idée… Les admissions sont gratuites ou remboursables (contrairement aux cégeps et aux universités).

Sachez, par ailleurs, qu’avec un diplôme de premier cycle (Undergraduate degree) et trois mois d’expérience en programmation, il est possible de s’inscrire à une formation en ligne dans une université aussi prestigieuse que le MIT pour douze (12) semaines de formation à temps partiel moyennant 3 400$ américains.

TAUX PLACEMENT

L’âge et les motivations sont importants dans le choix d’une formation. Lorsqu’on cherche à se réorienter ou à se trouver un emploi après sa formation universitaire, il faut considérer le taux de placement et les connexions avec le milieu des affaires.

Les grandes universités travaillent activement sur leur service de placement ou de stage en entreprise, mais ne réussissent pas toujours à offrir le « service après-vente » des écoles privées spécialisées.

Le taux de placement des diplômés des écoles interrogées pour cet article se situe entre 85 et 95%. Certaines s’appuient sur un réseau de partenaires recruteurs. Elles organisent aussi des journées de recrutement après la formation et préparent les finissants aux entrevues.

FRAIS DE SCOLARITÉ

Les prix tournent autour de 10 000$ pour quelque 450 heures de formation. Le service carrière de placement est parfois gratuit, mais il peut coûter jusqu’à 3 000$. Renseignez-vous avant l’inscription.

Comme ce n’est pas donné, l’aide financière pourrait servir. À cet effet, lisez les 4 meilleurs moyens de financer la formation de Wagon Canada ou téléchargez le guide financier de Lighthouse Labs.

Certaines écoles bénéficient aussi de partenariats académiques avec des universités canadiennes comme en Saskatchewan et au Nouveau-Brunswick, ce qui tend à réduire les coûts d’inscription pour les étudiants inscrits dans un programme universitaire.

RECONNAISSANCE DU DIPLÔME

Malgré une grande demande pour ce genre de compétences sur le marché de l’emploi, les formations privées en science de données ne sont pas non plus reconnues par le ministère de l’Enseignement supérieur du Québec ni pour une attestation d’études collégiales (AEC).

« Il n’y a que la Teluq qui peut offrir des formations 100% virtuelles reconnues par le ministère en ce moment », déplore Ines Alvergne. Elle précise que l’Impérial Collège à Londres et HEC Paris ont fait le choix d’intégrer une formation Wagon dans leur cursus plutôt que de créer un programme.

C’est bien connu que les écoles de formations privées résistent mal aux pressions protectionnistes de nos institutions d’enseignement publiques québécoises. La logique étant de préserver la valeur de nos diplômes universitaires.

Afin de requalifier certains travailleurs plus rapidement, n’aurait-on pas intérêt à laisser plus de place aux formations de pointe plus flexibles et accessibles, tout en ajoutant des balises pour s’assurer que l’enseignement soit reconnu?

Car former de grands cerveaux dans nos universités est une chose; former des travailleurs intelligents et des spécialistes sachant opérer dans un environnement numérique en est une autre.