Projet de loi 19 : le débat sur les données en santé reste ouvert

Projet de loi 19 : le débat sur les données en santé reste ouvert

Les données médicales sont-elles trop inaccessibles au Québec ? Les dédales administratifs par lesquels doivent passer les chercheurs pour accéder à ces données constituent-ils un frein à la recherche ? Et les droits des patients sont-ils adéquatement encadrés par le système juridique actuel ? Ce sont là quelques-unes des questions qui seront présentées lors d’un colloque prochain consacré au projet de loi 19.

Présenté par l’Observatoire international sur les impacts sociétaux de l’IA et du numérique (OBVIA) et ses partenaires, le Hub santé – politique, organisations et droit (H-Pod), ainsi que l’Institut intelligence et données (IID) de l’Université Laval, le colloque aura lieu le vendredi 28 janvier.

À cette occasion, des experts en droit, en recherche, ainsi que des représentants des droits des patients ouvriront le débat sur les enjeux soulevés dans la foulée du projet de loi sur les renseignements de santé et de services sociaux (PL19).

« Il est temps que l’on examine un modèle juridique plus moderne pour la gestion de nos données en santé », affirme Pierre-Luc Déziel, professeur à la Faculté de droit de l’Université Laval et coorganisateur de l’événement.

« L’objectif est de rassembler tous les acteurs de la société québécoise qui sont touchés par cette proposition de loi (…), afin qu’ils puissent bien la comprendre » -Pierre-Luc Déziel, professeur, Faculté de droit, Université Laval

Mobiliser la communauté scientifique et outiller la population générale afin « qu’ils se fassent leur propre opinion » sur ce débat assurera que l’adoption de la loi prendra sa pleine « légitimité », croit le professeur.

UN CADRE QUI « DÉMULTIPLIE » LES DÉMARCHES

Le PL19 se veut un effort pour faciliter « l’accès [aux données] en temps opportun et optimiser l’usage qui peut en être fait, en vue d’améliorer la qualité des services offerts à la population », selon le document de projet de loi déposé à l’Assemblée nationale en décembre dernier.

En effet, comparativement aux systèmes établis en Ontario ou au Manitoba, le système de santé québécois impose de nombreuses étapes aux chercheurs qui désirent accéder aux données médicales à des fins de recherche.

« Il faut passer par la Commission de l’accès à l’information et il faut aussi informer les patients visés par ces données, souligne M. Déziel. Notre cadre juridique actuel démultiplie les démarches mises en place par le processus d’autorisation. »

Ce dernier explique que pour certains chercheurs le cadre juridique présent ne leur facilite pas la tâche. Ceux-ci jonglent parfois avec une dizaine de projets de recherche à la fois et doivent attendre des mois, voire des années, avant d’obtenir un accès aux données.

« En revanche, il existe des modèles, comme en Ontario, qui offrent des plateformes de données accessibles aux scientifiques pour faire des demandes d’accès direct », explique le professeur.

Celui-ci affirme que l’enjeu est d’autant plus important au Québec, car malgré son “imperméabilité”, le système de santé produit des données en santé d’une grande qualité.

S’il croit tout de même essentiel de conserver un cadre juridique qui assure la sécurité des informations et la protection de la vie privée des patients, M. Déziel indique que la nouvelle loi pourrait aussi leur démontrer l’importance de l’utilisation collective de ces données.

« La situation actuelle de la pandémie nous a démontré la nécessité d’avoir des informations en santé mises en commun. Si les citoyens pouvaient percevoir les retombées positives liées au partage des données, ils verraient sans doute d’un meilleur œil la réforme. »

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