[ENTREVUE] SQRI² : “Il faudra faire preuve de beaucoup de créativité”, selon Luc Sirois

[ENTREVUE] SQRI² : “Il faudra faire preuve de beaucoup de créativité”, selon Luc Sirois

Si le Québec est réputé pour sa créativité et son excellence en recherche publique, le milieu de l’innovation en est sûr; il faut en faire davantage pour passer des idées au marché. C’est pourquoi la province vient de lancer sa nouvelle Stratégie québécoise de recherche et d’investissement en innovation 2022-2027 (SQRI ²). À l’occasion de son dévoilement, CScience IA s’est entretenu avec nul autre que l’Innovateur en chef du Québec, Luc Sirois, pour connaître les enjeux et ambitions ayant orienté le développement de la SQRI².

Sur quoi mise-t-on pour déployer la Stratégie ?

Nous misons sur l’investissement en recherche, en innovation, en commercialisation, en entrepreneuriat et en talent, pour qu’au Québec, nous ne soyons pas seulement forts en recherche, mais aussi en développement de nouveaux produits.

L’attraction et la rétention de talents est une préoccupation majeure pour la communauté d’affaires, des sciences et de l’innovation. Est-elle au cœur de la Stratégie ?

L’attraction et le recrutement de talent, c’est un axe clé de la Stratégie. La question du besoin de main-d’œuvre et de relève y est omniprésente. J’ai fait la tournée des entreprises, et ai rencontré pas moins de mille dirigeants. Le premier point abordé lors de nos échanges était la préoccupation quant à l’innovation pour combler ce besoin, et ça dépassait les raisons associées à la COVID.

Quels sont les défis précisément liés à cet enjeu, pointés par la communauté consultée ?

C’est un enjeu de deux façons. D’abord, les entreprises ont du mal à livrer la marchandise et à répondre au carnet de commandes, en termes de main-d’œuvre, sur la scène de production et sur la scène des services. C’est un défi et ça demande beaucoup d’implication des dirigeants, alors détournés de leur objectif qui vise à développer de nouvelles choses.

« Au Québec, lorsqu’on regarde les données, c’est catastrophique. On constate qu’on est moins productifs ici que dans le reste du Canada et ailleurs dans le monde. »

– Luc Sirois, Innovateur en chef

Ensuite, il y a la question de la pénurie de personnel qualifié, spécialisé, en technologie et en science, qui travaillerait au développement des innovations, de la recherche et du développement, et des technologies. Avec la Stratégie, on se concentre aussi là-dessus.

Quand on regarde le taux de diplomation universitaire au Québec, on voit qu’il est légèrement inférieur à celui des autres nations, ce qui signifie que l’on génère moins de professionnels pour l’industrie du savoir et les domaines de l’innovation. Pour remédier au problème, nous proposons des solutions créatives.

Parmi les propositions relevant de la SQRI², on retient un investissement de 252 M $ pour développer la relève et les recherches en innovation, mais aussi pour développer la culture de la science et de l’innovation, afin d’augmenter la part de jeunes gradués dans les domaines scientifiques. Est-ce que ces ressources vont suffire ?

Il faudra faire preuve de beaucoup de créativité au cours des prochaines années, c’est certain. Mais le fait d’avoir mobilisé des spécialistes du secteur et des ressources dédiées à la question me rend confiant. Nous innovons au chapitre des procédés internes, en intégrant la technologie de sorte à limiter les opérations devant être réalisées par l’homme, pour en favoriser la productivité. C’est ça, la clé!

Au Québec, lorsqu’on regarde les données, c’est catastrophique. On constate qu’on est moins productifs ici que dans le reste du Canada et ailleurs dans le monde. Cela signifie qu’on a besoin de plus de travailleurs pour produire autant et générer le même niveau de richesse. On y met plus de travail, sans l’optimiser, ce qui nous pousse à moins bien rémunérer les travailleurs. Alors, investir dans l’innovation pour améliorer la productivité, c’est ce qui va permettre de doter la société d’un système d’éducation qui progresse, d’un réseau de santé à la hauteur de nos attentes, et d’une culture en plein essor, soutenue, où nos artistes se sentiront valorisés et gagneront bien leur vie.

Veut-on, justement, miser sur la transition vers le numérique, en investissant dans la technologie pour automatiser les processus des milieux organisationnels et institutionnels ?

D’autres grandes stratégies ont effectivement été lancées par le gouvernement pour cette transformation. Pensons à l’Offensive de transformation numérique (OTN), qui implique d’accélérer le virage numérique d’environ 75 000 entreprises, issues de l’ensemble des secteurs d’activité et des régions du Québec. Avec la SQRI², nous allons plutôt mettre l’emphase sur le développement des nouvelles technologies et des nouveaux procédés.

De quoi êtes-vous le plus fier quant à la SQRI² ?

Ma plus grande fierté dans tout ce qui a été fait, c’est la contribution d’un énorme bassin de personnes et d’organisations qui se sont engagées dans la réflexion, pour identifier les enjeux et trouver des idées. J’ai passé toutes mes vacances sur les plages des Îles de la Madeleine à lire et éplucher les 230 mémoires que nous avons reçus, et les idées y avaient été réfléchies, non pas selon le contexte corporatif des visées individualistes, mais dans l’intérêt supérieur du Québec. Un tel niveau de participation et de contribution n’avait encore jamais été vu auparavant!


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