[ÉDITORIAL] : Nous ne pouvons faire l’impasse sur l’apport des technologies vertes

[ÉDITORIAL] : Nous ne pouvons faire l’impasse sur l’apport des technologies vertes

Les technologies sont devenus le bouc-émissaire des dérives et des excès de notre époque aux yeux de bien des personnes. En matière d’environnement, et alors que les alertes des scientifiques se font de plus en plus alarmistes quant aux conséquences du réchauffement climatique en cours, l’innovation technologique, et en particulier celle utilisant l’IA, reste un outil puissant pour espérer renverser la tendance. 

La vidéo est devenue virale et le message a provoqué le débat. Vous l’avez sans doute vu passer sur vos fils d’actualité : il y a quelques jours, en France, l’appel des étudiants d’Agro Paris Tech à “déserter” l’agro-industrie et à mettre à terre le système dans son intégralité plutôt que de le changer a jeté un véritable pavé dans la mare.    

Un geste surtout révélateur d’un état d’esprit partagé par de plus en plus d’individus dans différentes sphères d’activité qui condamnent le progrès technologique comme facteur des maux qui accablent notre époque, et en premier lieu les bouleversements climatiques. 

Les technologies vertes au banc des accusés

L’un des messages entendus à l’occasion de cet appel relayé par cette vidéo virale se résume à poser la question de l’utilité de “développer des énergies dites “vertes” qui permettent d’accélérer la numérisation de la société tout en polluant et en exploitant à l’autre bout du monde”.

Une question qui mérite légitimement d’être posée, tout comme on pourrait aussi s’interroger sur le fait que les serveurs informatiques des technologies numériques censées produire des réponses modélisées aux problématiques du réchauffement climatique participent aussi au réchauffement de la planète en… produisant de la chaleur, tout simplement.

Mais une fois que l’on a dit cela, que l’on a constaté cela, quelle alternative constructive propose-t-on réellement ? Fuir la réalité et condamner le progrès technologique, c’est sans doute confortable pour nos consciences en quête de bien-être, mais cela ne répond pas forcément aux défis du monde présent.

Pour ne pas tomber dans le cynisme

Les technologies, comme tous les outils, peuvent tout aussi bien se révéler bénéfiques que nocives. Cela dépend de l’utilisation qu’on en fait. Mais la condamnation sans appel du recours à ces technologies dans la lutte contre le réchauffement climatique apparaît comme un remède qui ne résout pas le mal.

Les défis actuels, globaux, complexes, interconnectés sont trop grands pour avoir le luxe de nous en passer. L’apport de technologies puissantes pour pouvoir y répondre est impératif. Et la maîtrise des données de masse est l’une des clefs essentielles dans cet arsenal de réponses. 

« Fuir la réalité et condamner le progrès technologique, c’est sans doute confortable pour nos consciences en quête de bien-être, mais cela ne répond pas forcément aux défis du monde présent. » – Philippe Régnoux, Directeur de publication CScience IA

Face aux phénomènes d’ampleur qu’induit le réchauffement climatique, seuls les gestes d’ampleur comptent. On le sait déjà, nos bons gestes quotidiens en faveur de l’environnement, s’ils nous donnent bonne conscience et contribuent à améliorer le sort de notre planète, ne représentent qu’une infime portion de la réponse à apporter aux changements climatiques en cours.

C’est au niveau industriel et à l’échelle des collectivités que se joue la partie. Ne pas intégrer les progrès qu’offre l’innovation technologique dans l’équation, et en particulier la modélisation des données les plus complexes à grande échelle, serait une erreur colossale.

Changer le système de l’intérieur prend du temps, mais il n’est pas vain. 

Des solutions concrètes

Les solutions proposées dans le cadre de la nouvelle SQRI ² 2022-2027, dévoilée la semaine dernière  s’inscrivent dans cette logique et se conforment en cela au Plan pour une économie verte (PEV) 2030 du gouvernement, avec une cible de réduction de 37,5 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport au niveau de 1990, et l’atteinte de la carboneutralité d’ici 2050.  

D’ici là, le réchauffement climatique amorcé et significatif depuis plus de vingt ans va malheureusement poursuivre sa lancée. Il faut donc prédire et donc prévenir ses effets qui ne feront que s’accroître.

« Ne pas intégrer les progrès qu’offre l’innovation technologique dans l’équation, et en particulier la modélisation des données les plus complexes à grande échelle, serait une erreur colossale. » – Philippe Régnoux, Directeur de publication CScience IA

Et puisque les émissions de gaz à effet de serre tout autant que les populations se concentrent surtout dans nos villes, c’est à l’échelle urbaine et périurbaine que devront s’appliquer en priorité les solutions pour maintenir la qualité de de vies de centaines de millions d’individus à travers le monde dans les trente prochaines années. 

Il va donc falloir mieux gérer le territoire : autrement dit, mieux gérer les flux de transports ainsi que l’étalement urbain. D’une part, minimiser l’auto solo en augmentant et en diversifiant l’offre de transport et, d’autre part, préserver les boisés et les milieux humides en zone urbaine. L’innovation technologique, et l’IA en particulier, peuvent nous aider à repenser le développement de nos villes en intégrant dans la réflexion et les calculs prédictifs sur nos territoires une masse de données de différentes natures. 

De même, et pour mieux nous fixer des objectifs de réduction de gaz à effet de serre à atteindre, encore faut-il avoir un état des lieux précis des émissions que nous générons. Là encore, l’IA peut venir à notre secours en nous permettant de faire parler les données pour optimiser la décarbonation des transports et des bâtiments.

Un reportage et une émission spéciale le 26 mai

Pour entendre la voix de ceux et celles qui continuent à penser que l’IA peut apporter des réponses concrètes aux défis climatiques, la rédaction de CScience IA vient de publier un tout nouvel épisode de la série balado DOCU 20, consacré au sujet.

Egalement, pour tâcher de mieux comprendre les impacts des changements climatiques et les solutions qu’offre l’intelligence artificielle pour les anticiper et mieux s’y adapter, la rédaction de CScience IA, en collaboration avec CScience Le Lab, le Conseil de l’innovation du Québec, les Fonds de Recherche du Québec, Alterum, Desjardins et le Coopérathon, propose une émission C+Clair spéciale disponible à la diffusion dès le 26 mai prochain.

L’événement en public, que j’aurai le plaisir d’animer depuis la Maison du développement durable de Montréal avec Anjali Caillat, Présidente du Conseil d’administration de l’organisme CScience Le Lab, et avec la journaliste Alexandra Troubestkoy, mettra en lumière des chercheurs et des entrepreneurs québécois qui viendront présenter leurs solutions technologiques pour répondre aux défis du climat. Pour l’occasion, l’Innovateur en Chef du Québec, Luc Sirois, ainsi que la journaliste de solutions Diane Bérard seront présent sur le plateau de l’émission et feront office d’observateur-témoins. Ils porteront un avis sur les solutions présentées.  

La discussion diffusée en exclusivité sur CScience IA pourra compter sur la présence d’un auditoire composé d’une trentaine de personnalités issues du milieu des technologies et du développement durable au Québec.

De quoi tenter de montrer que face à l’ampleur des changements induits par les changements climatiques en cours, et loin des discours alarmistes ou radicaux, il est possible d’orienter nos modèles de développement sans forcément tout jeter à la vidange de l’histoire. 

Philippe Régnoux
Directeur de publication, CScience IA
p.regnoux@galamedia.ca

Crédits photo image en Une : Istock