Lancement d’ABEONA Network pour l’inclusion des femmes en innovation

Lancement d’ABEONA Network pour l’inclusion des femmes en innovation

Ce mercredi 8 mars se tenait la rencontre Femmes et Innovation : Des actions concrètes tournées vers l’avenir, en simultané depuis la France et le Canada, afin de réfléchir à la place qu’occupent les femmes dans le secteur de l’innovation et des technologies.

L’événement s’est tenu à Montréal, Paris, Toronto et Vancouver. Pour célébrer cette Journée internationale des femmes, la French Tech Toronto, la French Tech Grand Paris et la CCI Française au Canada ont publié un rapport faisant état de la place des femmes en innovation.

Le rapport France – Canada d’analyse des organisations de soutien aux femmes entrepreneures regroupe les témoignages de plus de 25 acteurs interrogés au Canada et en France. Incubateurs, investisseurs, associations, entreprises et startups ont été consultés afin d’identifier les obstacles auxquels font face les femmes en technologie, et de réfléchir à des solutions possibles pour favoriser leur inclusion.

Abeona Network est le premier réseau France-Canada de soutien aux femmes issues du milieu des STIM.

L’événement a aussi souligné le lancement d’ABEONA Network. Ce réseau France-Canada est une initiative qui vise à offrir un meilleur soutien aux femmes entrepreneures en science, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM), en plus de faciliter le partage de connaissances entre les deux pays et diriger le monde de la technologie vers un écosystème plus diversifié. Il s’agit du premier réseau France-Canada de soutien aux femmes issues de ces milieux.

Illustrer les inégalités

L’écart salarial persiste, tant au Canada (16,1%) qu’en France (15,8%). Les deux pays sont aussi loin de la parité quant aux personnes étant en position de pouvoir. En ingénierie, les femmes occupent seulement 16,3% des postes au Canada, et 4,8% de ceux en France.

« Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les femmes sont moins présentes que les hommes, et lorsqu’elles le sont, elles occupent à peine des postes de direction et ont moins de possibilités d’évolution. »

– Sophie Lagoutte, Consule générale de France à Montréal

« Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les femmes sont moins présentes que les hommes, et lorsqu’elles le sont, elles occupent à peine des postes de direction et ont moins de possibilités d’évolution », lance Sophie Lagoutte, Consule générale de France à Montréal.

Le rapport rappelle que « les femmes sont encore trop souvent confrontées à des stéréotypes et à des discriminations qui limitent leur accès aux postes à responsabilité et aux financements, et qui freinent leurs opportunités d’évolution à l’international. » Il indique également que près de 40% des employés de startups subissent de la discrimination.

« Nous devons prendre des mesures pour remédier aux inégalités qui existent dans notre société, en particulier dans le secteur technologique. Nous devons nous assurer que tout le monde a une chance juste et équitable de réussir », soutient Michel Miraillet, ambassadeur de France au Canada.

Un portrait mitigé

Bien qu’il y ait encore beaucoup de progrès à faire, le portrait de ce secteur n’est pas que noir. En 2022, une enquête menée par le Web Summit révélait que d’importants acteurs en STIM estiment que la situation s’améliore. « 30,9% des femmes interrogées (dont 79% sont européennes) pensent que l’industrie tech prend des mesures appropriées en matière d’égalité et de parité hommes-femmes, et 35% d’entre elles pensent que l’indice d’égalité femmes-hommes au sein de leur entreprise s’est amélioré au cours des 12 derniers mois », note l’étude.

Malgré ces avancements et la présence grandissante des femmes en STIM, elles ne représentent tout de même que 25% du personnel canadien de ce domaine, soulève le rapport. Parvenir à « l’équilibre entre les sexes n’est pas qu’un devoir moral, mais aussi une nécessité économique. Alors que des industries clés ont constamment besoin de plus de talents dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, comment accepter que la moitié de la population soit quasiment laissée de côté ? », se désole Sophie Lagoutte.

Des pistes de solutions

Mis à part la création du réseau ABEONA Network, six principales recommandations émergent comme pistes pour favoriser l’inclusion des femmes :

  • Offrir un meilleur soutien et accompagnement aux entreprises pour favoriser l’intégration des femmes dans leurs équipes
  • Avoir une approche intersectionnelle afin de surmonter des obstacles à l’inclusivité.
  • Mettre en contact les entreprises et organisations qui accompagnent les femmes dans en technologie et dans leurs projets entrepreneuriaux
  • Favoriser le réseautage et l’engagement gouvernemental
  • Mettre de l’avant davantage de femmes entrepreneures dans les médias
  • Offrir aux femmes des ressources et des sources d’inspiration afin d’accéder à des positions de leader

Un panel au cœur du sujet

Photo : Roxanne Lachapelle

En guise de conclusion à l’événement, un panel regroupant 4 femmes provenant du milieu de l’entrepreneuriat et des STIM a eu lieu. Les quatre intervenantes sont catégoriques : l’éducation des jeunes femmes est nécessaire pour augmenter la présence des femmes en STIM.

« L’innovation est la conduite du changement. L’innovation, c’est l’humain, et sa clé est la diversité », Delphine Persouyre, partenaire opérationnelle de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ).

Stéphanie Jecrois, cofondatrice et directrice générale de Technovation Montréal, estime que les mettre en contact avec des modèles de femmes du milieu peut leur permettre de réaliser qu’elles ont les aptitudes requises pour se diriger vers cette carrière. Un changement de mentalité chez elles lui semble nécessaire : « Quand on leur parle de l’entrepreneuriat, les jeunes filles ont tendance à vouloir tout contrôler et à avoir toutes les solutions avant de se lancer dans un projet. Il y a un travail à faire en matière d’éducation : il faut les sensibiliser à essayer, à se tromper.  Elles doivent être indulgentes envers les autres, mais aussi envers elles-mêmes. »

Delphine Persouyre, partenaire opérationnelle de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), aborde dans le même sens, et souligne l’importance de l’erreur qui est selon elle « un moteur pour l’innovation. » Mme Persouyre avance l’idée que les femmes amènent potentiellement plus une culture du droit à l’erreur dans le monde professionnel en raison de leur tendance à plus douter à et à plus se remettre en question que les hommes.

Leur tendance à douter provient notamment d’une vision sociétale qui perçoit les STIM comme un milieu d’hommes, suggère Marion Nadeau, directrice régionale au Québec de Décathlon Canada : « Il y a beaucoup de clichés à déconstruire globalement dans la société. Il faut réussir à casser ces codes préétablis. »

Ces codes découragent souvent des femmes à aller vers ces carrières : « Des femmes se disent : soit j’ai de l’ambition et mise tout sur ma carrière, soit je décide de fonder une famille. Je trouve ça triste que des femmes pensent que c’est l’un ou l’autre. Comment parvenir à changer cette perception, et (leur faire comprendre) qu’elles n’ont pas à choisir entre la vie professionnelle et la vie personnelle ? », se questionne Solenne Lafeytaud, vice-présidente et chef des affaires corporatives et de l’engagement chez L’Oréal Canada.

Au-delà de ces questionnements qui restent, il apparaît clair pour ces quatre expertes que les femmes sont nécessaires au succès de l’innovation, des STIM et de l’entrepreneuriat : « L’innovation est la conduite du changement. L’innovation, c’est l’humain, et sa clé est la diversité », croit Delphine Persouyre.

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Crédit Image à la Une : Roxanne Lachapelle