En me fondant sur ma propre expérience, je vais tenter pour vous d’analyser les plus récents développements en quantique, IA et autres technologies, afin de mieux vous préparer à ce qui nous attend, dans un futur proche.
Lire cette chronique telle que parue initialement dans la revue animée et interactive LES CONNECTEURS :
Je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas ici de prédictions, mais bien d’une analyse fondée sur des faits, qui crée ce que je m’amuse à appeler « un futur possible ».
Ces quelques événements, survenus au cours des 18 derniers mois, ont un impact aujourd’hui :
- Février 2023 – le lancement d’Azure Quantum Element ;
- Mars 2023 – le lancement de Chat GPT-4 ;
- Juin 2023 – des avancées en chimie et science des matériaux ;
- Décembre 2023 – le lancement de Gemini par Google Deepmind ;
- Septembre 2024 – l’inauguration de MonarQ au Québec ;
- Octobre 2024 – des développements en quantique en France ;
- Novembre 2024 – une série d’annonces en lien avec d’importantes avancées pour Microsoft Ignite.
Des événements qui témoignent de l’accélération du rythme de l’innovation…
Premièrement, quelques définitions…
Microsoft Azure Éléments, c’est quoi?
Azure Éléments est un environnement que Microsoft a créé pour accélérer la recherche. Cet environnement n’est ouvert qu’à des groupes de recherches très précis, soit en génétique, recherches de matériaux et en chimie. Il s’agit d’une classe d’ordinateur qui allie quantique HPC (high performance computing) et IA. Le but est d’accélérer les programmes de recherches pour régler les grands problèmes de la planète.
« Le but est d’accélérer les programmes de recherches pour régler les grands problèmes de la planète. »
Selon les premiers essais, cette plateforme était en mesure de réduire une année de calcul en 4 minutes, soit 50,000:1, puisque la plateforme est 50 000 fois plus rapide que les méthodes de calcul traditionnelles pour certaines tâches spécifiques.
En collaboration avec le Pacific Northwest National Laboratory, Microsoft a utilisé Azure Quantum Éléments pour modéliser et analyser 32 millions de nouveaux matériaux candidats, aboutissant à la découverte de matériaux potentiellement capables de remplacer les batteries lithium-ion.
Démystifier ce que sont Copilot, Gemini, Llama, Bard, Claude et ChatGPT
En gros, il s’agit de différents produits, des modèles IA, qui proviennent de différentes compagnies. C’est la course aux armements, version IA.
Non que je veuille offenser les grands fans des modèles de génération de contenu, mais à mon sens, il s’agit d’une mise en bouche. Nous n’en sommes qu’au balbutiement.
Tout ces modèles sont encore en mode d’apprentissage et sont une préparation, une mise en place de l’acceptation sociale pour ce qui s’en vient.
Et c’est sans compter le fait qu’ils sont énormément énergivores… Pourquoi? Parce qu’à chaque requête, le modèle recherche et fait référence à des milliards d’entrées pour répondre à votre question. Ces données et ces processeurs doivent exécuter ces recherches sur des ordinateurs dédiés et, vous l’aurez deviné, ne sont pas en mode « économie d’énergie ».
La seule nuance que je souhaite apporter relativement à ces modèles se rapporte à Copilot. La version pour entreprises du modèle de Microsoft a cette exception d’être conçue pour que les données demeurent dans votre environnement, ce qui, à mon avis, est une proposition unique et extrêmement intéressante pour les entreprises qui souhaitent infuser de l’IA dans leurs processus d’affaires.
L’élection américaine
L’ordre exécutif présidentiel
Le 30 octobre 2023, Le président Biden a émis un ordre exécutif concernant les futurs développements en IA. Cet ordre mettait en place les fondements d’un cadre contraignant pour les sociétés américaines et un premier pas pour encadrer le futur de l’IA.
L’ordre était composé de 4 grands vecteurs :
- Standards en sécurité et en prévention
- Protection de la vie privée
- Intégration des Droits civiques et équité
- Collaboration avec les partenaires internationaux
L’initiative a reçu un accueil mitigé, mais fut salué comme une première pierre dans la fondation de la création d’une intelligence artificielle de confiance, sûre et surtout juste et équitable.
Le président élu, Donald Trump a promis, durant sa campagne, qu’il annulerait l’ordre exécutif, laissant place au libre marché.
Le premier ami
Nous avons droit, pratiquement en direct, à une scène historique. Un nouveau rôle au sein du gouvernement, le premier ami.
Le défi est que cet ami n’est nul autre qu’Elon Musk, l’homme le plus riche de la planète, qui est également dirigeant de SpaceX, Tesla, et plus récemment Twitter.
Ce que peu de gens savent, c’est que Musk a participé à la création d’OpenAI, en tant que société sans but lucratif. Il a d’ailleurs participé à la première ronde de financement de l’OBNL. Il a également collaboré à la mise ne place de règles de gouvernance très strictes qui ont guidé OpenAI.
En 2018, il quitta le conseil d’administration, suite à des divergences d’opinion, surtout autour du changement de modèle d’affaires, pour aller vers un modèle à profit limité.
Pourquoi est-ce que je mentionne ceci? D’abord parce que Musk a, depuis 2016, une société qui vise à lier l’esprit humain à l’ordinateur, Neural Link, et qu’il a également lancé sa propre société d’IA en 2023 (xAI), avec une mission de comprendre la vraie nature de l’univers. Son propre modèle d’IA, Grok, se nourrit entre autres des données disponibles dans X.
Donc, quand nous combinons ces derniers points, nous pouvons comprendre qu’il y aura, selon les événements à venir, un fort risque de dérapage.
Les annonces de Microsoft Ignite
Hollow core Fiber : le véhicule pour l’ère de l’IA
Microsoft a investi fortement, depuis quelques années, dans une nouvelle technologie de transport d’information, la fibre à cœur creux nommée « Hollow Fiber ».
En décembre 2022, il a acquis l’un des leaders dans ce segment de marché, la firme Lumenisity.
La logique derrière ce nouveau modèle : l’air a moins de friction que le verre. Donc, il est possible d’émettre des signaux lumineux, à travers un tuyau vide, ce qui permet de déplacer plus de données, plus rapidement. Combien en plus? Environ 47 % plus vite, avec 4 fois plus de données.
Donc, à l’ère de l’IA, pouvoir transporter plus de données, plus rapidement, représente un avantage significatif pour la qualité du traitement.
Source : How hollow core fiber is accelerating AI | Microsoft Azure Blog
Des partenariats pour élargir l’empreinte quantique dans Azure
Il est important de noter que Microsoft et son partenaire Continuum avait annoncé, il n’y a que quelques mois, un record de 12 qubits logiques. Et en quelques mois, le record fut brisé de nouveau. 24 qubits logiques avec la société Atom Computing. Ce qui, apparemment, est un record. La barrière pour un avantage scientifique quantique serait de 100.
C’est alors que Satya Nadella annonce une collaboration étroite avec Atom Computing et Microsoft. Le but étant de co-créer un nouvel ordinateur quantique commercial, mais pas n’importe lequel : le plus grand ordinateur commercial, intégrant des technologies d’auto-correction et, surtout, un modèle de processeur qui offrira le plus grand nombre de qubits qui soient stables et sans erreur.
Les chercheurs peuvent passer d’un modèle de prédiction statique à dynamique
La mise en place d’Azure Quantum Elements permet désormais à de grande sociétés de recherche de faire des prédictions dynamiques. Elles sont donc en mesure de valider une structure de protéine dynamiquement, au fur et à mesure que les facteurs externes changent.
Il n’y a pas si longtemps, cela aurait pris des années d’essais et erreurs.
« 21 leçons pour le 21e siècle »
Je suis en pleine lecture de ce superbe ouvrage de Yuval Noah Harari. Une merveilleuse suite à « Sapiens », que j’ai dévoré précédemment. Je les recommande fortement.
Si nous considérons que nos émotions sont le résultat de signaux dans le cerveau, et que ces derniers peuvent êtres interprétés et traduits en mathématiques, alors pourquoi est-ce qu’une IA ne pourrait pas l’interpréter, voire même la reproduire? C’est là tout le principe qui soutient sa réflexion. Il jette ainsi un peu une douche froide sur le concept qui veut que l’IA ne peut avoir de sentiment et de conscience, chose que je trouve importante à réaliser, surtout durant cette course vers l’intelligence artificielle générale.
Et il va même plus loin, en soumettant que certains rôles de la société, impliquant justement la lecture de ces sentiments, pourraient être mieux « performés » par une machine, qui n’aurait pas de biais cognitif ou d’historique.
Quantum + IA, ça sert à quoi ?
Imaginez un instant que nos meilleurs modèles IA, d’ici 3 ans, aient soudainement accès à un ordinateur quantique de 100 qubits. Qu’est-ce que cela impliquerait? Le modèle IA pourrait calculer toutes les possibilités et résultats d’une solution en quelques secondes.
Un peu comme Doctor Strange dans le film « Avengers Infinity War », lorsqu’il examine les millions de futurs possibles.
Donc, le modèle prédictif sera immense… mais encore? Pensons simplement au traitement de l’information, à l’analyse et l’évaluation de risques, aux sentiments, ou même à la créativité. Car, oui, si tout à coup, l’IA est munie de la quantique, qu’est-ce qui l’empêcherait de créer? De faire preuve de créativité?
Et attention, je ne parle pas ici de répliquer ce qu’elle a appris sur l’analyse de tous les textes existants de Shakespeare, mais bien de créer à partir de rien.
La limite que même notre cerveau détient sera désormais de l’histoire ancienne.
Maintenant, imaginez, une équipe de scientifiques qui souhaitent résoudre le problème du réchauffement climatique, avec un ordinateur quantique, de données météorologiques et relatives à la pollution des 100 dernières années, et d’une IA de pointe. Alors, nous avons une chance de régler ce problème.
C’est ce que permet ce genre d’avancée : régler des problèmes qui sont plus grands que nos capacités actuelles.
Quel impact sur la cybersécurité ?
Le défi est que la cybercriminalité et le dark web sont désormais la seconde économie mondiale. Donc, si des compagnies comme Microsoft peuvent investir en recherche et développement pour des technologies à grand impact comme la quantique, alors nos compétiteurs du côté obscure peuvent également le faire.
Nous pouvons donc être certains que les cybercriminels vont tous faire pour prendre avantage de ces dernières avancées et tenterons de l’utiliser pour s’enrichir davantage.
Par contre, j’ai bon espoir que les avancées faites de ce côté ne seront pas rapidement disponibles de l’autre.
De plus, j’ai personnellement envie de développer pour cette nouvelle plateforme. J’ai même imaginé un produit qui, je crois, aurait beaucoup d’intérêt pour les PME : une plateforme qui permettrait le déchiffrement des compagnies qui seraient victimes d’une attaque de rançongiciel. Mais je vois aussi de nombreux autres produits qui viendraient soutenir les cyberdéfenseurs dans leurs luttes contre les cybercriminels.
Pourquoi est-ce que la cybersécurité est une pierre angulaire pour l’IA ?
Comme vous l’aurez deviné, l’IA est nourrie à travers sa base de données. Les modèles sont toujours en mode d’apprentissage et d’amélioration.
Donc, qu’arrive-t-il lorsque quelqu’un a accès à l’altération de votre modèle, et le nourrit de fausses informations? Eh bien tous les systèmes et processus d’affaires en sont affectés.
Si la tendance se maintient, nous aurons bientôt une invasion d’agents, tous propulsés par l’IA, pour accompagner et améliorer l’exécution de nos tâches quotidiennes, que ce soit pour préparer une réponse à un courriel, choisir un film ou même déterminer le meilleur resto à proximité.
Alors, selon vous, est-ce que vos données personnelles et vos données d’entreprise sont prêtes?
Imaginez, lorsque vous en serez rendus à analyser votre plan de croissance stratégique avec un agent IA pour obtenir un point de vue externe. Ne croyez vous pas que cela demandera une bonne dose de confiance? Et si une IA corporative a accès à l’entièreté de vos données, êtes-vous sur qu’il n’y aura pas de fuite de données, vers des personnes issues d’organisations qui ne devraient pas les avoir en leur possession? Tant de choses à sécuriser avant d’activer le modèle…
La loi de Moore à l’ère de l’IA
La loi de Moore, ainsi nommée par le co-fondateur d’Intel, en 1965, impliquait que le nombre de transistors sur un microprocesseur doublait aux deux ans.
Cette règle, traduite librement dans les cercles informatiques, a tenu bon pendant près de 50 ans.
Elle est à la veille d’être envoyée aux oubliettes.
La comparaison que je donnais à l’un de mes collaborateurs il y a quelques jours est que le modèle T est sur le point de se faire dépasser par une Tesla.
Depuis l’arrivée de l’infonuagique, nous voyons déjà une cadence d’innovation extraordinaire, entre 600 et 1 000 nouveautés par année.
Même cela est à la veille d’être considéré comme antique.
Les prévisions de l’été 2023 voulaient que durant l’été 2025, nous allions avoir une IA avec un quotient intellectuel de 1 500. En comparaison, Albert Einstein en avait un de 180. Donc, une puissance de calcul décuplée, et une intelligence fortement supérieure à la nôtre. Ce monde est sur le point d’être transformé. Espérons pour le mieux…