À mi-parcours depuis le lancement du déploiement de la Stratégie québécoise de recherche et d’investissement en innovation 2022-2027 (SQRI ²), quel bilan en font les acteurs du milieu? Voici ce qu’il faut retenir de l’exposé mené sous l’égide du Ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie (MEIE), ce vendredi 11 octobre 2024.
Le bilan en quelques points
En gros, « La SQRI2, c’est quand même 7.5 milliards de dollars sur cinq ans, ce qui n’est pas rien (…) on a à peine dépassé le budget de 1.5 milliard de dollars par année pour les deux premières années (…) on est sur la bonne voie. Maintenant, est-ce que cela a apporté les résultats escomptés? », a lancé Mathieu Gervais, ex-sous-ministre adjoint à la Science et à l’Innovation au MEIE, et actuel sous-ministre associé du secteur des industries stratégiques et des projets économiques majeurs, pour ouvrir le bal.
1. L’interdisciplinarité et la refonte des trois FRQ en un seul

Julien Camirand Lemyre (président de Nord Quantique), Vincent Aimez (Vice-recteur à la valorisation et aux partenariats de l’Université de Sherbrooke), Marie-Josée Turgeon (PDG de C2MI), Rémi Quirion (Scientifique en chef du Québec et modérateur du panel)
Pour le sous-ministre, la fusion des trois Fonds de recherche (FRQ) en un seul, officialisée par la sanction du projet de loi 44 en mai dernier et sa mise en œuvre en juin, avec le maintien des trois secteurs de recherche (Nature et technologies, Santé, et Société et culture) à même sa structure, « est un accomplissement, mais qui n’est pas terminé », puisqu’il estime que du chemin reste largement à faire en matière de recherche interdisciplinaire.
Rémi Quirion a martelé l’importance de renforcer la littératie scientifique et l’échange intersectoriel en recherche. « On ne peut plus travailler en vase clos », a lancé le Scientifique en chef du Québec, qui revenait tout juste du Japon, inspiré par les idées de grandeur de Couche-Tard, qui ambitionne de devenir le plus grand exploitant de dépanneurs au monde en rachetant ceux du japonais 7-Eleven.
2. Les investissements en R-D
« Ce qui est inquiétant, c’est qu’on est sur une pente descendante quant aux investissements des entreprises en recherche et développement (R-D) en enseignement supérieur. On est passés d’un taux de 8,3 % en 2014, à 6,2 % en 2017, puis à 5,8 % en 2021 », observe Mathieu Gervais, insistant sur l’importance de convaincre les entreprises « des bénéfices de la R-D ».
Il salue quand même le succès d’Axelys, l’accélérateur et OBNL créé en avril 2021 par le gouvernement pour propulser le développement et le transfert d’innovations à haut potentiel issues de la recherche publique. « Axelys, c’est plus de 200 déclarations d’inventions par année », un exploit selon le sous-ministre, d’autant plus que l’organisation est « nouvelle ».
3. La création de start-up

Frédéric Bastien (co-fondateur d’Amiral Ventures), Marjorick Foisy (DG du Centech), Richard Chénier (DG de Québec Tech), Isabelle Vézina (Secrétaire du CIQ et modératrice de ce panel).
« Il faut créer davantage de start-up. Cela sera difficile à atteindre, mais pas impossible », soutient-il.
« On ne crée par assez d’entreprises au Québec, et certains pensent que l’innovation se mesure en parts de marché », complète Isabelle Vézina, Secrétaire du conseil d’administration du Conseil de l’innovation du Québec (CIQ).
« Quand on regarde le Québec par rapport au reste du Canada, si on veut améliorer la productivité, il faut mettre au monde des entreprises technologiques qui seront concurrentielles, parce que la compétition à l’international est forte. On le constate avec Québec Tech, on voit ce qui se fait partout et on doit accélérer la cadence parce qu’ailleurs, on l’accélère. L’écosystème est moins organisé au Québec, lorsqu’on le compare, par exemple, à la French Tech », renchérit Richard Chénier, directeur général de Québec Tech, qui agit également à titre de consultant stratégique au gouvernement provincial dans le cadre du projet de l’espace Ax-C, une initiative lancée pour créer un pôle d’innovation entrepreneuriale de classe mondiale à l’échelle de Montréal, qui verra le jour en 2025. Ce futur espace d’entrepreneuriat innovant vient d’annoncer que Bell, Google, Desjardins et le Fonds de solidarité FTQ intégraient le projet, amenant avec eux un soutien financier total de 5,25 millions de dollars, et une participation active à la croissance des start-up adhérentes.
L’adoption de l’IA et l’essor du quantique
Mathieu Gervais fait valoir que bien que « beaucoup d’efforts (aient été investis) dans le développement responsable de l’IA, maintenant, il faut pousser pour l’adoption de l’IA en entreprise ».
Enfin, on rappelle que le quantique est la prochaine révolution tech à surveiller, avec une zone d’innovation dans le secteur déjà foisonnante d’opportunités et de talents à Sherbrooke.
Le président de Nord Quantique, Julien Camirand Lemyre, qui décrit sa jeune pousse comme étant « le pur produit de cette chaîne d’innovation de Sherbrooke », témoigne de l’importance de l’accès à des infrastructures « aussi bien structurées et innovantes » que celles mises à la disposition des entreprises comme la sienne dans la zone d’innovation, car elles ont permis à Nord Quantique « de transformer la majorité de (ses) opérations, et tous les « CAPEX » (dépenses d’investissement) – (qu’elle) aurait eus à faire dans d’autres écosystèmes – en OPEX (dépenses d’exploitation) », pour « concentrer tous (ses) efforts sur la création de valeur dans l’entreprise plutôt que sur l’achat d’équipements essentiels à la R-D ».
Crédit Image à la Une : Rémi Quirion, Scientifique en chef du Québec et Mathieu Gervais, sous-ministre associé du secteur des industries stratégiques et des projets économiques majeurs. (Photo : Capture d’écran)
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