L’agroalimentaire québécois à l’heure de la transition écologique

L’agroalimentaire québécois à l’heure de la transition écologique

L’agroalimentaire est un secteur qui soulève beaucoup d’enjeux en termes de développement et d’investissement, étant donné son impact direct et universel sur la population mondiale. En effet, le commerce alimentaire est l’un des rares domaines économiques qui affectent, de manière quotidienne et essentielle, la vie de chaque être humain sur la planète. Ce secteur est d’autant plus primordial à réévaluer pour proposer des solutions visant à faciliter la transition écologique. Quelles sont les ambitions du Québec pour placer l’agroalimentaire au cœur des priorités d’innovation?

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À l’occasion de la conférence tenue le 17 octobre dernier par le Conseil des Relations Internationales de Montréal (CORIM), Martin Caron, président général de l’Union des producteurs agricoles (UPA), est venu parler de commerce international et de durabilité dans l’agriculture ainsi que de la façon dont se positionne le Québec par rapport à ces problématiques.

Un potentiel de croissance pour l’agroalimentaire

Martin Caron en conférence

Dans une allocution centrée sur la mondialisation des aliments et des enjeux internationaux, Martin Caron a souligné plusieurs éléments mis de l’avant par une étude produite en 2022 pour le compte de l’UPA.

Il souligne notamment que le potentiel de croissance des différents secteurs de production en matière d’agroalimentaire au Canada, évalué à 23 % d’ici 2030, représente 4 % de plus pour l’économie québécoise dans son ensemble.

Le potentiel de croissance des différents secteurs de production en matière d’agroalimentaire au Canada, évalué à 23 % d’ici 2030, représente 4 % de plus pour l’économie québécoise dans son ensemble.

Cependant, le président général de l’UPA souligne plusieurs conditions pour atteindre cette croissance ; notamment l’amélioration des programmes de sécurité de revenu, en prenant en compte l’impact climatique, mais aussi l’accroissement des investissements en automatisation et robotisation, une main-d’oeuvre qualifiée disponible autant pour les entreprises agricoles que pour les entreprises de transformation, ainsi qu’un accès à du financement pour augmenter ou renouveler les actifs de production.

Parmi ces quelques conditions citées, l’accès à un soutien pour faire face au changement climatique est l’un des éléments principaux, puisque cela émerge également d’attentes sociétales en termes d’actions à mener. Le président général de l’UPA marque ainsi la volonté de l’union de faire partie des solutions de transition écologique en soulignant le besoin d’avoir des outils octroyés par une politique agricole gouvernementale.

Un soutien gouvernemental essentiel

Martin Caron, Jérôme Dupras (modérateur) et d’autres invités

Ces outils, comme l’explique Martin Caron, s’apparentent ainsi à un soutien financier relatif à l’adaptation au changement climatique qui, au Canada, est trois fois moins élevé qu’aux États-Unis, selon une étude de la Banque Royale publiée en octobre 2023.

Face aux nombreuses pressions économiques, sociales et réglementaires sur les producteurs, Martin Caron met de l’avant la relève agricole, qui s’appuie sur un meilleur soutien gouvernemental afin de maintenir une agriculture robuste, pérenne et compétitive.

« Au Canada c’est 6 % des terres qui servent au niveau de l’agriculture. Quand on se compare aux États-Unis, c’est 45 %. En France, 58 %. Vous comprenez que le 2 % au Québec, c’est pour cela que l’UPA est là. »

– Martin Caron, président général de l’UPA

« Au Canada c’est 6 % des terres qui servent au niveau de l’agriculture. Quand on se compare aux États-Unis, c’est 45 %. En France, 58 %. Vous comprenez que le 2 % au Québec, c’est pour cela que l’UPA est là. Je vous dirais que ce n’est pas un commerce équitable et prospère que l’on fait. » Ce soutien gouvernemental pourrait d’ailleurs voir le jour prochainement, comme l’évoque Martin Caron, en soulignant le renouvellement de la politique bioalimentaire, qui propose une « vision 2025 » pour un secteur bioalimentaire prospère, durable, ancré sur le territoire et engagé pour l’amélioration de la santé des Québécois.

Projets et innovations pour établir des actions avec nos entreprises agricoles

« Il faut un allié : l’agriculture. », soutient Martin Caron, présentant l’agriculture non seulement comme un secteur nécessitant des investissements, mais aussi comme un allié stratégique en lien avec les initiatives des unions agricoles pour maintenir une certaine productivité sur le plan des biens alimentaires.

« Il faut un allié : l’agriculture. »

– Martin Caron, président général de l’UPA

Selon l’intervenant, le premier outil pour faire de l’agriculture est la santé des sols ainsi que la gestion de l’eau. Le plan Agriclimat de 2017 est d’ailleurs l’un des nombreux projets qui ont mis en valeur les producteurs agricoles de la région. Ce plan, dont l’initiative est de faire l’évolution du bilan carbone par rapport au changement climatique, intègre les producteurs dans les solutions, en démontrant qu’il ne faut pas seulement s’adapter, mais aussi lutter contre ce changement climatique.

Une initiative qui va de pair avec les 12 plans régionaux sur lesquels travaillent les unions, ainsi que le laboratoire vivant qui met de l’avant la reconnaissance de l’expertise des producteurs, des scientifiques et des chercheurs du milieu agricole comme plus-value par rapport aux entreprises. 

En parlant d’initiatives innovantes, Martin Caron ne manque pas d’évoquer l’intelligence artificielle, qui bénéficierait à être démocratisée pour aider à lutter contre le changement climatique. « Les pratiques ont évolué, les nouvelles technologies sont là – Il y a l’IA. Il y a un côté privé à l’IA. Il va falloir trouver une façon de démocratiser cette information, pour qu’elle serve à tout le monde et aide à lutter contre ce changement climatique », amène le président général.

« Les pratiques ont évolué, les nouvelles technologies sont là – Il y a l’IA (…) Il va falloir trouver une façon de démocratiser cette information (…) »

– Martin Caron, président général de l’UPA

La robotisation pour la modernisation des infrastructures

L’un des quelques autres éléments pour atteindre un potentiel de croissance, et non le moindre, est la modernisation des infrastructures de transformation, qui constitue un atout principal au Québec. Comme l’indique Martin Caron dans le cadre de l’étude de 2022 produite pour l’UPA, 70 % des choses que l’on produit sont transformées ici au Québec. Un avantage qu’il faut continuer de travailler, comme le souligne l’intervenant, puisque, quand l’on se compare au Canada, la moyenne est de 25 %.

« Ici on est le leader. Au Québec, on a 10% des fermes qui font de l’agriculture biologique, comparativement à 3 % dans le reste du Canada. »

– Martin Caron, président général de l’UPA

En matière de biodiversité, il évoque ainsi le virage que prennent les pratiques agricoles avec l’automatisation de la robotisation, en citant notamment l’exemple des robots, qui passent dans les champs pour le désherbage. Cela contribue ainsi à garantir l’avenir de la santé des sols et la protection de la biodiversité, en plus des objectifs ciblés pour réduire les pesticides. « Ici on est le leader. Au Québec, on a 10% des fermes qui font de l’agriculture biologique, comparativement à 3 % dans le reste du Canada. »

Il évoque ainsi la nécessité de s’assurer de l’utilisation des produits au bon moment et à la bonne place, pour arriver dans les entreprises agricoles québécoises, un des nombreux autres « beaux défis » que les producteurs sont prêts à relever d’après le président général de l’UPA.

Enjeux et priorités locales

L’agriculture semble ainsi faire consensus sur son symbole de patrimoine pour le Québec, semblable à une culture à protéger, qui requiert des normes sociétales selon Martin Caron.

Il souligne la notion de cohérence entre les ententes sociétales qu’ont les citoyens et ce que voient les consommateurs dans les marchés. Il soutient l’idée qu’on ne peut pas laisser rentrer n’importe quels produits d’ailleurs, qui n’ont pas les mêmes normes sociales et environnementales qu’à l’échelle locale. « De plus en plus, on commence à négocier, pas juste quant au produit mais quant à la façon de le produire, et cela nous encourage nous, les producteurs. »

« De plus en plus, on commence à négocier, pas juste quant au produit mais quant à la façon de le produire, et cela nous encourage nous, les producteurs. »

– Martin Caron, président général de l’UPA

La convention internationale faite en collaboration avec la coalition Nourrir l’humanité durablement et l’UPA, établit justement un meilleur équilibre entre le commerce mondial et des aliments, le maintien de la biodiversité, la protection de l’environnement, la pérennité des ressources ainsi que la diversité et la sécurité alimentaire.

Martin Caron affirme d’ailleurs que l’agriculture et l’agroalimentaire devraient constituer le premier projet de société d’un pays, et que les États doivent se doter de ce pouvoir. Un objectif qui semble atteignable selon le président général de l’UPA, qui croit aux valeurs de collectivité forte de la province québécoise.

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