Montréal, une pointure internationale pour soutenir la recherche en santé numérique

Montréal, une pointure internationale pour soutenir la recherche en santé numérique

Comment Montréal parvient-elle à se placer sur la scène internationale? Alors que le Québec multiplie les projets d’innovation en santé numérique, les start-up n’hésitent pas à poser leurs valises dans la métropole pour installer leur activité et enrichir l’écosystème.

Montréal : un pôle d’attraction

De nombreux arguments semblent pousser les start-up à venir s’installer à Montréal, malgré les failles qui peuvent exister dans le système de santé québécois.

Lors de l’événement du Centre de Recherche Informatique de Montréal (CRIM) portant sur l’IA et la santé le 2 octobre dernier, plusieurs panélistes se sont accordés sur les quelques qualités de la province qui semble constituer un réel centre d’innovation à travers son expertise, son système d’accompagnement collaboratif ainsi que ses nombreux autres avantages concurrentiels à l’international.

Rencontré à l’événement, la participante Nancy Fournier, directrice des opérations et des partenariats de R-D chez CliniGuide, fait valoir l’attrait qu’a vu l’entreprise à s’installer à Montréal, qu’elle considère comme une place internationale.

Bénéficiant de nombreux investissements étrangers, la start-up propose un tableau de bord qui résume les données cliniques des patients et leurs options, tout en intégrant des outils d’IA pour guider les cliniciens dans le futur.

Ce que la directrice des opérations de CliniGuide confère à Montréal, c’est sa réglementation de données et d’IA ainsi que son système de financement, qui semblent plus facilitants à l’échelle locale en comparaison à l’Europe. Elle soutient notamment que l’expertise que l’on trouve dans la métropole se projette davantage dans une médecine du futur, et s’engage d’autant plus à développer des technologies innovantes.

Quelle vision pour notre écosystème à l’étranger ?

Stéphanie Doyle, directrice principale, Europe, Investissements étrangers Montréal International, concède à Montréal une IA de renommée mondiale, qui s’inscrit dans un pôle aux avantages financiers concurrentiels. Selon elle, plusieurs incitatifs financiers comme les crédits d’impôts, le coût de la vie moins élevé et la qualité de vie supérieure participent à attirer les investissements étrangers dans la province.

« Le grand Montréal est parmi le top 10 des pôles en sciences de la vie en Amérique du Nord. »

– Stéphanie Doyle, directrice principale, Europe, Investissements étrangers Montréal International

Un argument qui n’est pas des moindres selon la panéliste, concerne la stabilité politique de la région qui est précieuse aux yeux des investisseurs et un attrait de plus, à l’inverse de certains pays occidentaux.

Nancy Fournier souligne, elle, une volonté de communiquer avec les industries, qui est plus marquée qu’ailleurs ; et ce, parfois même aux États-Unis.

« Je suis souvent approchée par d’autres canaux de communications de grandes entreprises internationales qui ne sont pas nécessairement installées ici mais qui choisissent le Québec pour venir tester, valider des algorithmes et développer leurs essais cliniques, parce que notre agilité à collaborer avec l’industrie est supérieure à ce qu’ils ont trouvé en Europe, et parfois même aux États-Unis. »

– Nancy Fournier, directrice des opérations et des partenariats de R&D CliniGuide

Cela s’expliquerait notamment par la proximité qu’ont les experts entre eux au Québec, qui ferait de la province une zone plus axée sur la collaboration plutôt que sur la compétitivité.

Les obstacles de financement pour soutenir la recherche

Malgré la réputation progressivement effervescente du Québec, plusieurs obstacles demeurent pour parvenir à concrétiser les projets de certaines start-up.

Les quelques panélistes qui sont venus décrypter les possibilités de financement pour l’IA en santé ont pointé du doigt le contrôle du risque lorsque l’on souhaite lancer un projet qui requiert du financement extérieur.

Mathieu Paquette, directeur, développement des affaires  et chef de l’équipe Québec au CQDM, parle de « centaines de millions » à dépenser avant de pouvoir générer des revenus.

Une notion importante qui revient souvent dans le jargon des investisseurs est « le techpush ». Selon Jean François Denault, expert en résidence au CQIB, ce qui empêche certains entrepreneurs de recevoir du financement, ce sont les projets qui s’appuient sur l’innovation technologique en elle-même, sans que cela réponde à un vrai besoin. D’après lui, il est ainsi nécessaire pour les entrepreneurs de s’interroger réellement quant à la façon dont leur technologie va s’intégrer dans le parcours de soin.

« Les gens vont dire qu’il n’y a pas de financement. Il y en aura toujours pour les bons projets. Le premier obstacle, c’est qu’on voit des technologies qui ne répondent pas à un vrai besoin et qui ne seront pas en mesure d’atteindre les marchés dans des bonnes conditions. »

–  Jean François Denault, Expert en résidence CQIB

Il semble ainsi essentiel, selon les panélistes, d’avoir un plan solide, autant du point de vue commercial, que sur celui de la gestion des données. Ils soutiennent d’ailleurs qu’il est primordial de générer des données qui sont utiles et cruciales pour l’avenir, tout en s’assurant que l’entrepreneur détient un droit d’appropriation de ses données.

Un tournant depuis le covid ?

Si certains obstacles persistent pour toucher du financement, certains intervenants mettent de l’avant un tournant autour des investissements depuis le covid. Stéphanie Doyle souligne un engouement en lien avec les quelques gros projets internationaux qui ont atterri à Montréal pendant la pandémie. Elle évoque notamment les fonds investis sur l’ensemble du Canada durant cette période, qui ont permis de rebâtir la chaîne d’approvisionnement de la province et de faire naître des filiales comme Moderna.  

Jeffrey Duong-Boudrias, directeur de comptes principal BDC, confirme « un regain d’enthousiasme sur l’investissement » à travers un coût du capital plus élevé, de l’argent moins fréquent et des taux d’intérêt qui diminuent depuis 2020.