Le 8 mai dernier, en marge du 90e Congrès de l’Acfas, et dans le cadre du concours Prix étudiants, l’Association pour la recherche au collégial (ARC) a récompensé trois projets innovants visant à démocratiser l’accès aux prothèses médicales grâce à l’impression 3D, à faciliter la détection d’incontinences de patients en milieu hospitalier, et à réduire le gaspillage par la valorisation alimentaire.
Des prothèses abordables
Les prothèses artificielles actuellement répandues sur le marché sont celles fabriquées à partir de technologies et de matériaux coûteux. Si peu de candidats peuvent se les permettre, ils ont souvent peur de les endommager. De nos jours, on envisage de plus en plus de se tourner vers l’impression 3D, notamment pour les doigts artificiels, une solution plus abordable, profitant à un bassin plus important de receveurs, en plus d’être plus adaptée et confortable, tant sur les plans esthétique que fonctionnel.
C’est ce que propose Yu Ran Wang, étudiante en Sciences pures et appliquées (Honours) au collège Marianopolis, et lauréate du premier prix pour son projet « It’s Going TiBia Ok: Prosthetic Design Using Freedom and Constraint Topology (FACT) ».
« Les coûts de production sont réduits, la durabilité du produit est améliorée et le confort de l’utilisateur est favorisé. De plus, ce prototype peut être entièrement imprimé en 3D, ce qui diminue le coût et le temps d’assemblage. »
« Malgré l’absence de câblage et de pistons hydrauliques, les prothèses utilisant des mécanismes flexibles imitent les muscles et les articulations humaines. Les coûts de production sont réduits, la durabilité du produit est améliorée et le confort de l’utilisateur est favorisé. De plus, ce prototype peut être entièrement imprimé en 3D, ce qui diminue le coût et le temps d’assemblage. La prothèse a été conçue avec la méthode Freedom and Constraint Topology (FACT), puis les éléments souples ont été analysés à l’aide de matrices qui calculent la rigidité et la torsion de la flexion. Comme prévu, le produit final est flexible le long de l’axe des articulations tout en conservant sa rigidité dans toutes les autres directions. La souplesse des éléments pliables confirme également les calculs théoriques. Quoique de conception simple, la prothèse peut être personnalisée en fonction de la taille, du poids, etc., de l’individu. Les prothèses flexibles (telles que celle concernée ici) sont abordables, entre autres, pour les personnes des communautés à faible revenu, améliorant ainsi considérablement leur qualité de vie », lit-on dans le communiqué émis par l’ARC.
C’est notamment « sa maîtrise du sujet, le professionnalisme de sa présentation et la prestance de son intervention, l’aplomb avec lequel elle a répondu aux questions qui lui ont été posées à la suite de sa communication, ainsi que sa capacité à vulgariser un projet complexe » en français — alors que ce n’est pas sa langue maternelle — qui lui ont valu la première place. Elle a mené son projet sous la supervision de la professeure de chimie, Angela Keane.
Un « nez artificiel »
Émile Raymond, étudiant en technologie du génie physique au cégep de La Pocatière, a remporté de deuxième prix pour son projet de recherche « Conception, validation et essai clinique d’un système de détection des incontinences », mené sous la supervision de Jonathan Bélisle, enseignant en technologie du génie physique. L’innovation proposée à l’issue de son projet est l’emploi d’un « nez artificiel » pour éviter aux membres du personnel en milieu hospitalier de s’en remettre à leur odorat pour déterminer si la couche d’un patient a été souillée.
« Le projet Nez artificiel porte sur le développement d’un appareil de mesure utilisant plusieurs capteurs de gaz pour déterminer la présence d’incontinence. »
« De manière à réduire le temps que passent les usagers en situation d’inconfort, il serait utile d’avoir une technologie fiable pour détecter automatiquement les selles et l’urine. Le projet Nez artificiel porte sur le développement d’un appareil de mesure utilisant plusieurs capteurs de gaz pour déterminer la présence d’incontinence. Nous présenterons le banc de test, le logiciel d’acquisition, le prototype final et son logiciel embarqué. Le prototype réussit à déceler des molécules présentes dans l’urine et les selles : le sulfure d’hydrogène, les composés organiques volatils (COV), le méthanethiol et le dioxyde de soufre. De plus, nous dévoilerons les résultats d’un essai clinique de trois semaines en CHSLD, qui a permis de déterminer les meilleurs capteurs pour détecter efficacement la présence d’urine ou de selles », a-t-on expliqué dans le cadre de la présentation du projet au Congrès de l’Acfas.
M. Raymond, qui s’est également vu octroyer la mention Relève étoile dans le secteur de la nature et des technologies, a impressionné le comité de l’ARC pour la dimension interdisciplinaire de ses travaux, et la collaboration dont il a fait preuve « avec des partenaires de divers milieux – ce qui se révèle dorénavant essentiel en recherche – et la cohérence avec laquelle il a présenté les écueils rencontrés, les solutions imaginées et, finalement, toutes les étapes de son projet », précise-t-on.
Valorisation alimentaire
Lauréat du troisième prix pour son projet « Effet d’un hydrolysat issu de coproduits de saumon sur l’inhibition de la croissance des microorganismes », Danick Bonnette, étudiant en technologie des procédés et de la qualité des aliments à l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec, propose de réduire le gaspillage alimentaire.
15 970 tonnes, c’est la quantité annuelle de coproduits générée par l’industrie de la pêche et de la transformation alimentaire au Québec
Ce sont 15 970 tonnes de coproduits que l’industrie de la pêche et de la transformation alimentaire génère chaque année au Québec, incluantd 730 tonnes issues des poissons pélagiques, dont la majorité est destinée à l’alimentation animale. Par « coproduits », on entend les éléments extraits des productions pour l’alimentation humaine, soit les arêtes, viscères, têtes et peaux.
« Ce projet propose une solution pour la valorisation des coproduits de façon à réduire l’empreinte environnementale, tout en trouvant une utilité alimentaire humaine innovante. Cette solution est l’utilisation d’un hydrolysat de protéines de peau de poisson, reconnu pour son activité antimicrobienne dans une matrice de poulet haché cru. L’enzyme commerciale Flavourzyme MD a été utilisée pour produire un mélange de peptides qui a ensuite été centrifugé, puis déshydraté. Une étude de durée de vie a été effectuée, intégrant l’hydrolysat dans une recette de boulette de poulet crue à 0 %, 1 % et 3 % m/m. La prolifération de bactéries aérobiques mésophiles, levures et moisissures a été observée sur une période de 14 jours. L’hydrolysat inhibe la croissance microbienne dans une matrice de poulet cru. En comparaison, la formulation à 0 % m/m poursuit une courbe de croissance microbienne normale. L’hydrolysat conserve donc son activité antimicrobienne lorsqu’on l’ajoute dans un aliment sensible à la croissance microbienne, tel le poulet haché cru. »
Crédit Image à la Une : Anna Shvets (photos 1 et 3) et Dalila Dalprat (photo 2)