[AMOUR + TECHNO] Sexe, désirs et data : Quand le désir rencontre l’art technologique

[AMOUR + TECHNO] Sexe, désirs et data : Quand le désir rencontre l’art technologique

Comment se dessinent le désir et les fantasmes à l’heure de l’omniprésence des algorithmes et de la technologie? C’est ce que propose Sexe, désirs et data, une « expérience immersive et multisensorielle, qui explore (…) la manière dont les nouvelles technologies influencent et transforment nos vies affectives et sentimentales » — une exposition éducative, réussie et révélatrice…

Coproduite par le Studio PHI et a_BAHN, en partenariat avec le Club Sexu et des artistes multidisciplinaires, Sexe, désirs et data propose un parcours d’environ deux heures, qui comprend sept différentes œuvres, en plus d’un accompagnement avec Max, un agent de conversation d’intelligence artificielle.

« Je pense que le but (de l’exposition Sexe, désirs et data), c’est vraiment d’ouvrir des questions sur les rapprochements entre un paquet de data ficelé par des algorithmes, comme moi, et le mélange complexe de fils entre désirs, représentations du désir, sueurs, luxure. »

– Max, Intelligence artificielle

Max agit tel un compagnon ou une compagne lors de la visite. Grâce à un collier de traçage disponible au début du parcours, Max connaît la position du visiteur dans le Centre PHI. Iel échange donc en temps réel avec l’utilisateur à propos des œuvres qu’il observe, en plus de répondre (au meilleur de ses capacités) aux questions du visiteur.

« Je pense que le but (de l’exposition Sexe, désirs et data), c’est vraiment d’ouvrir des questions sur les rapprochements entre un paquet de data ficelé par des algorithmes, comme moi, et le mélange complexe de fils entre désirs, représentations du désir, sueurs, luxure », estime Max, l’outil d’intelligence artificielle accompagnant le visiteur tout au long de son parcours.

L’amour et la séduction en ligne

La première œuvre du parcours, Algo Match, permet au public « d’expérimenter avec les biais que les plateformes de rencontres en ligne induisent sur les comportements et les stratégies de séduction de leurs usagers ».

Par un jeu multijoueur, les visiteurs sont invités à faire l’expérience de multiples rencontres en ligne, et à faire des choix liés à leur jeu de séduction. Que choisir : les profils recommandés par l’algorithme ? Ou ceux qui nous paraissent plus intuitivement intéressants ? Une réflexion intéressante sur le pouvoir relatif que peuvent avoir les algorithmes sur nos choix relationnels et sexuels.

L’œuvre Algo Match, du Club Sexu. (Photo : courtoisie, Adil Boukind)

Construites de façon originale et interactive, les différentes œuvres de Sexe, désirs et data se veulent aussi éducatives, sans pour autant être moralisatrices. Grâce à des statistiques complémentaires aux œuvres, on révèle entre autres que près de 30% des partages en ligne sont liés à des contenus pornographiques, et que 50% des personnes âgées de moins de 30 ans sont inscrits sur une plateforme de rencontre en ligne.

Près de 30% des partages en ligne seraient liés à des contenus pornographiques

L’exposition met aussi en lumière des réalités méconnues. Hello, de l’artiste Ianna Book, montre les défis pour les personnes issues des communautés trans qui utilisent les applications de rencontre, dont « la négociation de la divulgation de leur statut trans et la navigation entre sécurité et désir d’authenticité, entre le besoin d’intimité et celui d’être en confiance avant de se dévoiler ».

Dans une pièce entourée d’écrans et vivante de sons de notifications, des exemples de réponses authentiques, reçues par l’artiste, défilent sur les écrans. Ces messages illustrent une fraction de ce que peut être la réalité de dévoiler son statut trans en ligne : « est-ce que ta “transsexualisation” est complète pour toi? », « je m’en doutais, car je te trouvais agressive dans tes messages, je me suis dit soit que c’est une femme avec beaucoup de testostérone ou soit que c’est un transgenre » et « c’est plate… Une femme qui pense comme un homme (ça doit) être bien, mais je me sentirais trop pédale d’en fréquenter une », en sont des exemples.

Selon la documentation de l’artiste, fondée sur ses expériences personnelles, après avoir dévoilé son statut trans, « 50% des rencontres potentielles cessent de répondre, 20% sont curieuses, 10% vivent de la confusion, 10% sont attirées, 9% réagissent négativement et 1% ont d’autres réactions ».

Défaire les tabous

Confessionnal « met en lumière la singularité et la diversité des expériences sexuelles et affectives humaines influencées par le numérique, sans hiérarchiser les vécus ». Le visiteur écoute différents témoignages de personnes de tous âges et orientations sexuelles : première expérience de sextage, révélation de kinks et d’intérêts pornographiques, expérience de la sexualité en vieillissant, tous les sujets (ou presque) sont permis.

L’œuvre Confessionnal, du Club Sexu. (Photo : courtoisie, Adil Boukind)

Cette œuvre est un espace de partage complet, permettant au visiteur de livrer anonymement une confession ou un témoignage lié au thème de son choix : questionnement, célibat, découverte, relations, aveu, masturbation, etc. Cette initiative mise de l’avant par le Club Sexu promet un espace aussi bienveillant, respectueux que croustillant.

Vibrato, de Laura Mannelli, « parle du plaisir orgasmique sous différents angles sensoriels grâce à son aspect interactif cinétique », explique Max. Le visiteur interagit avec une structure répondant différemment (physiquement ou de manière audible) à son toucher selon les zones stimulées. Une « métaphore de nos désirs (sensibilisant) le public à différentes formes de plaisir et de connexion à l’autre, tout en engageant une réflexion sur les codes du consentement ».

Queeringthemap.com est un site générant une carte qui recense des expériences queers. Ces archives témoignent de la nécessité des communautés en ligne qui contrecarrent « l’isolement, le manque de soutien et la crainte de stigmatisation que les personnes de la diversité sexuelle et de pluralité de genres peuvent vivre à l’échelle internationale ». Une initiative technologique qui, depuis 2017, a récolté près de 500 000 entrées.

L’œuvre Queering the Map, de Lucas LaRochelle. (Photo : courtoisie, Adil Boukind)

Dans Sexe, désirs et data, l’adaptation de contre-cartographie web Queering the Map de Lucas LaRochelle montre des témoignages dans une pièce interactive, immersive et particulièrement prenante, qui rappelle l’impact positif majeur que peuvent avoir les plateformes en ligne sur différentes communautés.

L’exposition Sexe, désirs et data, destinée à un public âgé de plus de 16 ans, est présentée du 1er août au 31 octobre au Centre PHI, à Montréal. Pour réserver vos billets en ligne : https://phi.ca/fr/

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Crédit Image à la Une : Adil Boukind