Réduire le fossé entre le savoir scientifique et la compréhension du public reste un défi de taille. La vulgarisation et la synthétisation de l’information deviennent alors des éléments importants pour rapprocher le grand public de concepts souvent complexes. Juliette Pierre, doctorante émérite en génie mécanique, s’est donné pour mission de démystifier les idées préconçues quant au doctorat et à la recherche scientifiques, au moyen de la bande dessinée.
La BD scientifique, qu’elle publie notamment sur son blogue, vise à informer les futurs doctorants quant à ce que le programme implique, et à faciliter la compréhension de différents domaines en science. Mme Pierre, qui a récemment été récompensée au Concours de vulgarisation de la recherche de l’Acfas pour son initiative, a accordé une entrevue à CScience.
Q: Sur votre blogue, vous précisez que lorsque vous avez entamé votre doctorat, vous avez constaté qu’il y avait beaucoup de méconnaissance quant au programme.
R: Oui, avant d’entamer mon stage de recherche, qui a débouché sur mon doctorat, je ne savais pas vraiment ce que ça impliquait. Évidemment, j’étais consciente du fait qu’il était question de faire de la recherche, mais à quel niveau ? Je n’en avais aucune idée.
« (…) en ce qui concerne le doctorat, il n’y a pas assez d’information qui se rend aux étudiants du baccalauréat. À moins que des personnes de votre entourage fassent un doctorat, vous risquez d’avoir beaucoup d’idées préconçues. »
– Juliette Pierre, doctorante en génie mécanique et bénédiste scientifique
C’est qu’en ce qui concerne le doctorat, il n’y a pas assez d’information qui se rend aux étudiants du baccalauréat. À moins que des personnes de votre entourage fassent un doctorat, vous risquez d’avoir beaucoup d’idées préconçues.
Par exemple, plusieurs pensent qu’ils doivent mener un parcours académique d’excellence, tandis que d’autres pensent que le doctorat implique de faire un travail solitaire, alors que ce n’est pas nécessairement vrai. C’est au travers de ce constat que j’ai eu l’idée de démarrer le projet de mon blogue.
Je le présente sous forme d’entrevue en bande dessinée, dans laquelle mes invités sont des doctorants comme moi. Ce format facilite la compréhension du lecteur, et me permet de vulgariser plus facilement l’information, tout en permettant de clarifier les enjeux d’intérêt.
Q: Comment se déroulent les entrevues ?
R: Je m’assure de poser toutes les questions possibles afin de bien cibler l’information, ce qui me permet de mieux vulgariser le travail de recherche de l’étudiant, tout en transmettant l’information de façon claire et concise aux lecteurs, afin qu’ils comprennent bien ce qu’est la recherche et le projet dans lequel l’étudiant est impliqué.
Les étudiants interviewés m’expliquent aussi leur parcours et comment ils ont fait pour se rendre au doctorat, car ils y a différentes façons d’y parvenir et ce n’est pas forcément en suivant un parcours linéaire. Je pose également des questions plus générales. Je leur demande, par exemple, ce qu’ils auraient aimé savoir avant d’entamer le programme, et ce qu’ils retiennent de cette expérience. Ce sont là toutes les informations que j’aime transmettre à mes lecteurs, dont plusieurs sont des étudiants envisageant de faire un doctorat.
Finalement, étant donné que je m’entretiens avec des étudiants de différents profils, et aux domaines et champs d’études variés, bande dessinée doit apporter un contexte, une histoire et une image accessibles, que les lecteurs peuvent se représenter, tout en renforçant leur connexion à la réalité du doctorant.
Q: Comment parvenez-vous à vulgariser la science relevant d’une branche ou d’un domaine que vous ne maitrisez pas ?
R: Premièrement, j’enregistre mes entrevues afin de conserver une piste de la conversation et pouvoir y retourner si je ne me souviens pas de ce qui a été dit. Ensuite, je crée un plan, dans lequel je me fais un schéma de l’information, en collaboration avec l’étudiant interviewé. Cela me permet de mieux comprendre les différentes sciences, telles que la biochimie et le biomédical, soit des domaines que je connais moins.
Une fois l’information retranscrite, je passe à la phase de création, qui consiste à produire des images claires et faciles à comprendre, tout en ajoutant une touche d’humour pour alléger et adoucir le ton parfois trop sérieux de la science. Finalement, je transmets l’information à l’étudiant interviewé et il en approuve le contenu. La publication de chaque épisode peut me prendre de quatre à six mois, car je fais cela sur mon temps libre.
Je trouve beaucoup plus facile de vulgariser un domaine qui n’est pas le mien car je m’attarde moins aux aspects techniques plus complexes, et mise sur des aspects plus généraux. Je me mets dans la peau d’un lecteur qui découvre le sujet en même temps que moi et j’opte pour la simple expression, sans tout le jargon scientifique.
« Je trouve beaucoup plus facile de vulgariser un domaine qui n’est pas le mien car je m’attarde moins aux aspects techniques plus complexes, et mise sur des aspects plus généraux. »
– Juliette Pierre, Doctorante en génie mécanique et bédéiste scientifique
Q: Quels sont les retours que vous recevez ?
R : Je reçois plusieurs commentaires positifs d’étudiants car plusieurs s’intéressent à l’aspect scientifique de l’information que contiennent mes bandes dessinées. Quant aux professeurs, ils m’ont grandement encouragée à mener mon projet, car cela contribue à démystifier le doctorat.
Crédit Image à la Une : Juliette Pierre