L’Intelligence artificielle va-t-elle faire disparaître les traders ?

L’Intelligence artificielle va-t-elle faire disparaître les traders ?

Des ordinateurs et des algorithmes superpuissants sont déjà capables de surpasser les humains en matière de prédiction boursière. Faut-il s’en inquiéter ou s’en réjouir ? Et surtout quels impacts ces nouvelles technologies vont-elles avoir sur les humains et sur les emplois dans le domaine de la finance ?

Jeff Glickman n’est pas vraiment connu du grand public. Cet ingénieur en informatique américain n’a jamais travaillé à Wall Street ni dans aucune banque. Et pourtant, aujourd’hui sa compagnie J4 Capital – qui ne compte que quatre employés – est de loin la meilleure pour prédire les variations de la bourse.

Ces prédictions, ce ne sont d’ailleurs pas ses employés qui les font, mais une « super intelligence artificielle » qu’il a mis un peu plus d’une décennie à créer. Dans un bureau de la banlieue de Seattle, cette super intelligence se matérialise par plusieurs rangées de serveurs – 400 au total – qui avalent et digèrent des quantités astronomiques de données marchandes chaque seconde.

60% DE PRÉDICTIONS JUSTES

Certes, cela  fait des années que les banques et les traders utilisent des algorithmes pour réaliser des transactions, même de manière autonome, mais ils sont régulièrement obligés de les reprogrammer, en fonction des variations de la bourse. La force de Jeff Glickman, c’est qu’il a réussi à créer une intelligence artificielle capable de se reprogrammer elle-même, en fonction des événements qui provoquent des mouvements boursiers. 

Interrogé par nos confrères de Fast Company, Glickman admet ne pas totalement comprendre comment son intelligence artificielle fonctionne. « Il y a une immense quantité de complexité, qui est impossible à comprendre pour un humain, mais un super ordinateur, lui, en est capable. » avoue le génie de l’informatique.

Au final, ses projections sont très bonnes, et c’est l’essentiel. Selon Jef Glickman, les prédictions de sa super IA sont correctes dans 60% des cas. À titre de comparaison, Renaissance Technologies, un des fonds spéculatifs « humains » les plus réputés au monde, arrive au mieux à 51% de bonnes prédictions des courbes.

200 000 SUPPRESSIONS DE POSTES DANS LES BANQUES AMÉRICAINES

Maintenant que l’on sait, entre autres grâce à Jeff Glickman, que des algorithmes sont bien meilleurs que nous pour prédire les marchés, quelles conséquences cela pourrait-il avoir en matière d’emploi, notamment dans la surveillance des marchés et particulièrement pour les traders ?

“Le rôle du trader va devoir changer assez vite. Ça va devenir quelqu’un qui comprend les principes d’apprentissage machine et d’apprentissage profond.”

– Jean-Marc Patenaude, président de Laplace Insight

Fin 2019, la Task Force sur l’intelligence artificielle du gouvernement américain a planché sur le sujet et a rendu un rapport des plus inquiétants. Selon elle, le développement et la multiplication des nouvelles technologies en finance devrait faire disparaître quelque 200 000 emplois dans les banques américaines.

DES INGÉNIEURS ET DES DOCTEURS EN MATHÉMATIQUES

Mais cela ne veut pas dire que l’IA et les algorithmes remplaceront définitivement les humains. Certes, le métier de trader tel que nous le connaissons n’existera très probablement plus, mais les banques et les fonds spéculatifs auront toujours besoin d’employés, capables de travailler avec ces machines. Selon Jean-Marc Patenaude, président de Laplace Insight – qui lui aussi a crée des algorithmes pour mieux prévoir les variations du marché -, c’est évident que « le rôle du trader va devoir changer assez vite. Ça va devenir quelqu’un qui est un peu plus scientifique, qui comprend les principes d’apprentissage machine et d’apprentissage profond, et enfin capable entraîner les algorithmes. »

Un virage en matière de recrutement déjà entamé par plusieurs des plus gros hedge funds. Renaissance Technologies justement , « engage aujourd’hui surtout des ingénieurs et des docteurs en mathématiques » précise Jean-Marc Patenaude. « cela nous donne quand même une idée assez précise de la direction que prend ce marché de la finance. »