Au cours des prochaines semaines, les personnes qui se rendront sur la Plaza St-Hubert verront apparaître deux petites navettes autonomes qui circuleront sur l’artère commerciale. Mais, quel sera le niveau d’autonomie de ces véhicules dotés d’une certaine forme d’intelligence artificielle (IA) ?
« La navette est essentiellement un robot, qui fonctionne sur un parcours préenregistré, explique Clément Aubourg, chef des véhicules autonomes pour Groupe Keolis, opérateur de transport dans le projet. Elle est en mesure de se repérer sur son parcours et elle peut anticiper les piétons et les autres véhicules pour ajuster sa conduite. Elle est aussi capable de voir et d’éviter les obstacles, comme les véhicules mal stationnés, ainsi que de détecter le signal des feux de circulation. »
Ces véhicules construits par le fabricant Navya atteignent donc le troisième niveau d’autonomie de conduite. Voir les explications à la fin du texte.
Des caméras et d’autres lecteurs optiques alimenteront l’IA afin qu’elle puisse naviguer le véhicule, qui s’ajustera à la vitesse de la circulation des autres voitures sur la route, indique M. Aubourg.
Les deux navettes qui parcourront la Plaza sur 2 km rouleront à une vitesse maximale de 20 km/h. Celles-ci feront une boucle comprenant trois arrêts sur la rue Saint-Hubert et quatre sur la rue Saint-André.
Entièrement électrique, la Navya possède une autonomie se situant entre huit et neuf heures, selon la consommation d’énergie à bord. En temps plus froid, le chauffage pour le confort des passagers pourrait réduire la durée de vie d’une charge de la batterie, souligne le responsable chez Keolis.
Un opérateur sera en tout temps assis derrière le volant en cas d’urgence et cinq autres passagers pourront monter à bord, soit moins de la moitié de la capacité maximale de la navette en raison des restrictions sanitaires engendrées par la COVID-19.
Le projet durera jusqu’en décembre de cette année, tout dépendant du moment où surviendront les premières chutes de neige. Les navettes seront alors mises au garage en attendant la deuxième phase, qui devrait débuter en mai 2022.
ACCEPTABILITÉ DU PUBLIC
La perception du grand public freine aussi les élans de telles technologies. Après tout, même les grands de l’industrie, tels que Tesla, souffrent d’un problème d’image à la suite d’accidents parfois mortels de leurs voitures sous autopilote.
« L’objectif principal du projet sur la Plaza était d’offrir un service demandé par la Ville, mais aussi de collecter des données pour améliorer le produit. De plus, cela nous permettra de montrer au public cette technologie et de recueillir son niveau d’appréciabilité vis-à-vis des navettes », affirme M. Aubourg.
Le responsable de la mobilité au sein du comité exécutif de la Ville de Montréal, Éric Alan Caldwell, est du même avis.
« Nous allons faire la collecte de données du projet pour voir quelle est l’adaptabilité des véhicules
autonomes sur nos routes et pour mieux comprendre les enjeux d’interaction et de sécurité avec les autres usagers », insiste-t-il.
Si le projet a plus des airs de laboratoire vivant que d’infrastructure permanente, M. Caldwell pense toutefois que les navettes autonomes ont le « potentiel d’apporter une forme de mobilité complémentaire au réseau de transports en commun déjà disponible ».
« On parle de l’enjeu du dernier kilomètre, cette distance qui reste à effectuer en descendant du bus ou du métro pour arriver à sa destination. Les navettes offrent une solution intéressante dans le contexte d’une artère commerciale, où les citoyens transportent leurs sacs et paquets. Ça pourrait faciliter les déplacements » -Éric Alan Caldwell, responsable de la mobilité au sein du comité exécutif de la Ville de Montréal
D’ailleurs, la phase deux du projet pourrait cibler la desserte « fine » de produits et marchandises dans les commerces, limitant la circulation par camion sur les lieux, indique M. Caldwell.
QUELS SONT LES NIVEAUX D’AUTONOMIE DES NAVETTES INTELLIGENTES ?
Il existe cinq niveaux de conduite autonome qui sont généralement distingués dans cette industrie.
- Au niveau zéro d’autonomie, la voiture ne comporte aucun processus automatisé et le conducteur gère toutes les manœuvres.
- Le premier niveau d’autonomie ne nous est pas étranger non plus, car il inclut les véhicules qui sont encore dirigés par un humain, mais une assistance à la conduite ou au freinage peut aider le conducteur.
- Au deuxième niveau d’autonomie, l’assistance à la conduite est renforcée. Plusieurs systèmes opèrent les uns avec les autres pour déterminer la vitesse et la conduite du véhicule, par exemple, pour le centrer au milieu de la voie. Un conducteur doit toutefois garder les mains sur le volant pour éviter les obstacles par exemple.
- C’est au troisième niveau d’autonomie qu’on atteint une forme d’autonomie généralement considérée comme augmentée par l’IA.
En effet, dans ce contexte, un véhicule peut prendre des « décisions » basées sur son interaction avec l’environnement rencontré sur la route.
Une série de capteurs incluant des caméras et des Lidars, télédétection par laser, est nécessaire au fonctionnement de l’appareil et un ordinateur collecte les données pour les analyser et ajuster la conduite en conséquence.
Un humain doit tout de même demeurer au volant pour prendre le contrôle en cas d’urgence.
- Ensuite, le quatrième niveau d’autonomie correspond à une forme d’autonomie élevée dans laquelle la présence d’un humain alerte au volant n’est plus nécessaire. Un véhicule de ce type pourrait toutefois ne pas fonctionner dans des conditions météorologiques extrêmes et il s’arrêterait en cas d’échec du système. Ce genre de technologie est en développement et n’existe pas pour l’instant sur le marché.
- Enfin, le cinquième niveau d’autonomie relève encore de la science-fiction. Une voiture munie d’une telle IA pourrait rouler dans presque toutes les conditions et ne serait plus limitée par le géorepérage, un logiciel de géolocalisation.
Crédit photo: Gracieuseté Keolis.