La pandémie a bouleversé toutes les institutions dans le monde. Elle n’a fait qu’accélérer une tendance de fond, celle de l’automatisation et de la montée en puissance des technologies numériques, comme l’intelligence artificielle ou le cloud (informatique à distance). Le cloud est largement utilisé par les établissements d’enseignement. Les étudiants ont dû s’habituer aux classes en ligne ou à des formules hybrides mêlant virtuel et présentiel. CScience IA a voulu se pencher sur cette rentrée qui a eu lieu sous le signe du numérique.
Depuis le mois de mars, le personnel enseignant s’affaire à trouver des moyens technologiques qui permettent de communiquer avec les élèves et de donner accès aux contenus des cours. Le virage numérique s’accélère. L’infonuagique explose.
Le marché mondial du cloud public a progressé de 26% l’an dernier et devrait connaître une hausse importante en 2020. Ce qui profite aux principaux fournisseurs notamment Amazon, Microsoft, Salesforce, Google et Oracle.
À l’Université McGill ce sont près de 30 000 étudiants qui continuent à suivre leurs cours en ligne (à l’exception des cours de musique et de santé). Une rentrée “normale” n’est pas prévue avant 2021.
« La première chose a été d’avoir des licences pour Zoom. On a demandé aux professeurs de réfléchir à de nouveaux concepts en ligne pour septembre. Pour les cours en laboratoires on a trouvé des logiciels de simulation qui reconstituent les labos dans différents domaines comme l’anatomie, la physique ou encore la chimie… Objectif: permettre aux étudiants d’avoir des expériences éducationnelles. Les professeurs dans ces domaines ont fait preuve de beaucoup d’imagination. Ils se sont creusé la tête. Ils ont par exemple demandé aux étudiants de faire des expérimentations depuis chez eux. Faire du Kombucha en microbiologie par exemple… » nous explique Laura Winer directrice des services de soutien pédagogique à l’Université McGill.
L’accélération du virage numérique
Hugo Dominguez, directeur des infrastructures TI à McGill souligne les prouesses techniques réalisées par ses équipes.
« On avait déjà des plateformes pour enregistrer certains cours et les diffuser en ligne, mais avec la crise sanitaire ça a explosé. Le défi ça a été de mettre en place toute l’infrastructure technique. On est passé de 150 à 2500 cours en ligne par exemple entre l’automne dernier et l’automne qui s’en vient. Dans ce contexte-là, il a fallu accroître les capacités. Le coût financier est important, mais moins que s’il avait fallu lancer de nouveaux services. »
Un peu partout au Québec, ce sont tous les campus qui ont dû se réinventer. Camille, étudiante en maîtrise en stratégie d’entreprise à HEC Montréal, qualifie cette rentrée 2020 de vraiment « particulière ».
« J’ai eu un mélange de cours en ligne et en présentiel parfois hybride (des élèves en classe et d’autres chez eux) avec un taux plus élevé de cours à distance. Même si les professeurs essaient de faire des pauses toutes les heures pour qu’on puisse assimiler et souffler un peu. Un cours virtuel demande beaucoup plus de concentration, je trouve. Et puis, on perd un peu ce lien social, car on ne peut pas parler aux autres élèves à la pause. En revanche, j’ai un prof. en gestion de cas qui a fait preuve d’une grande imagination. Comme on ne peut pas rencontrer vraiment du monde, il se déplace à travers le monde grâce à un fond vert qu’il a installé derrière son bureau. Il affiche ainsi des paysages différents des lieux dont il parle. Une plage, San Francisco, un chalet… Ça permet de voyager un peu partout… (sourires). »
Redéfinir l’enseignement
Thierry Karsenti professeur à la faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les technologies de l’information et de la communication en éducation souligne l’importance de proposer des enseignements qui impliquent davantage les étudiants.
« Enseigner, ce n’est pas juste réciter un cours devant sa caméra pendant 3 heures. Ça peut vite être ennuyeux. Il faut convaincre les profs d’être créatifs et innovants. Ce n’est pas parce que l’apprentissage en ligne n’est pas bon. L’écran, c’est pas vraiment le problème. Il faut bouger aussi et éviter de rester assis. C’est dur de garder l’attention des élèves. Il faut chercher à les impliquer activement. Je pense que cette pandémie va amener à redéfinir l’enseignement » conclut-il.
Photo: Camille, étudiante à HEC Montréal