Faut-il s’émerveiller devant les nouveaux agents robotisés aux allures de chiens, déployés au Québec comme dans le reste du monde ? Ou bien s’en inquiéter ?
Un projet novateur pour la STM
Le robot Spot, un prototype qui effectue des tâches de repérage, a fait son apparition dans le métro de Montréal. Il vise à soutenir les équipes d’entretien, en facilitant le repérage d’éléments problématiques.
Déployé cet été à la station Bonaventure, le chien-robot combine le modèle de quadrupède développé par l’entreprise américaine Boston Dynamics, qui se veut automatisé et autonome, et une plateforme logicielle conçue par la jeune pousse montréalaise Osedea.
Spot a ainsi été déployé dans le métro par la Société de transport de Montréal (STM) pour repérer les anomalies ou situations problématiques, et ainsi préparer le terrain pour les équipes d’entretien afin qu’elles gagnent du temps.
Il est muni d’une caméra et d’un bras articulé avec pince – système qui lui permet de couvrir un champ de surveillance supérieur aux caméras traditionnelles.
« Nous avons adapté le robot Spot pour un projet pilote, dans le métro de Montréal », nous précise Martin Coulombe, président d’Osedea. La compagnie québécoise Osedea est partenaire et distributrice du fabricant américain Boston Dynamics qui a conçu, entre autres, le robot bionique Spot.
« La STM a misé sur ce projet pilote pour se donner le droit d’essayer des choses et d’évaluer certaines pistes d’amélioration pour l’entretien de nos stations de métro. »
– Daniel Thibault, surintendant entretien des stations chez STM
« La STM a misé sur ce projet pilote pour se donner le droit d’essayer des choses et d’évaluer certaines pistes d’amélioration pour l’entretien de nos stations de métro. » La société de transport cherche ainsi à prendre part à l’innovation technologique par ce projet expérimental, mené l’été dernier et terminé cet automne 2022.
Des exploitations encore insoupçonnées
Mais les fonctions des chiens-robots les plus inoffensifs à ce jour s’arrêteront-elles au simple repérage pour la détection d’anomalies et l’entretien ? Si les robots sont déjà en mesure de détecter des déchets, il n’est pas difficile d’imaginer qu’ils pourront un jour détecter d’autres phénomènes d’une manière très sophistiquée. Cette sophistication laisse donc soupçonner d’autres rôles et missions possibles, associés aux chiens-robots.
Le robot Spot, par exemple, est muni de systèmes de reconnaissance d’image très pointus. Il pourrait aisément servir de caméra de sécurité, bien que ce ne soit pas l’intention de la STM, comme nous le précise Philippe Déry. On peut également entrevoir d’autres fonctions possibles, en gardant en tête que ces systèmes ont été conçus au départ pour servir la guerre.
M. Déry nous rassure alors, en précisant que l’expérimentation est terminée et qu’« elle s’est faite la nuit, alors que le métro était fermé ». Le robot a permis de « récolter des visualisations qui pourraient servir à améliorer la prise en charge des situations requérant l’intervention des équipes d’entretien des stations. L’expérimentation était menée dans une perspective d’amélioration de l’expérience client », complète-t-il. Par ailleurs, Martin Coulombe compare cette approche à celle des startups, qui consiste à mettre en place des prototypes pour innover.
Notons que le robot Spot a déjà servi en tant qu’agent fureteur pour la police aux États-Unis, l’État américain de Massachusetts ayant été le premier à l’intégrer en 2019.
Un risque pour les emplois ?
Une autre crainte liée à l’arrivée potentielle de ces robots dans le transport en commun est la perte d’emplois dans ce secteur. Pourtant, M. Coulombe affirme que l’intervention de ces robots va permettre d’éliminer des emplois jugés dangereux.
« L’utilisation de robot pourrait permettre de remplacer certaines tâches et non des employés! »
– Philippe Déry
Le robot ne remplacerait pas les emplois, pour M. Déry. Il effectuerait plutôt des tâches trop risquées ou répétitives pour les humains, mais qui sont importantes pour le maintien du réseau de transport. Le robot pourrait même sauver des vies, en ce sens, nous précise M. Coulombe.
Des airs de ressemblance
Au premier abord, nous pouvons être frappés par la ressemblance du robot Spot avec le robot BigDog, ou encore ceux de Unitree Robotics en Chine.
En effet, on ne peut nier que le chien-robot Spot s’apparente étrangement aux robots guerriers, d’un point de vue purement esthétique. D’ailleurs, la compagnie américaine Boston Dynamics a travaillé pour le militaire. Elle a développé BigDog, un robot, également à l’allure d’un chien, financé par la DARPA (Agence de recherche du département de la Défense des États-Unis). Mais les partenaires du projet pilote de Spot nous rassurent.
Contrairement au robot BigDog, le robot Spot n’a pas été conçu à des fins militaires, et s’appuie sur une toute autre technologie. Depuis sa création, Spot est destiné à des fins commerciales et repose sur un système électrique, tandis que le robot BigDog, alimenté au gaz, a été lancé en 2005 et financé par l’agence de recherche du département de la Défense des États-Unis, avant d’être abandonné en raison des bruits excessifs engendrés par son moteur à deux temps. Il ne faudrait donc pas se laisser berner par les apparences.
« Ayant été achetée par Hyundai, l’entreprise Boston Dynamics ne cherche plus à travailler pour le militaire. »
– Martin Coulombe
Par ailleurs, « le projet de SPOT dans le métro, en collaboration avec la STM, n’est qu’un projet expérimental, ajoute Martin Coulombe. Il n’y a pas eu d’opérations et seulement des conceptions ». Selon lui, « le militaire a souvent financé les avancées technologiques, il n’y a là rien de nouveau » et il ne faudrait donc pas faire allusion à la violence de ces robots.
D’autres engins issus de la robotique militaire
Il faut tout de même savoir que les États-Unis comme la Chine se sont lancés dans la course mondiale de la robotique associée aux technologies militaires. Ces robots, qui semblent avoir la physionomie d’un chien sans tête, ont été conçus pour le militaire et pour constituer une armée aussi menaçante qu’une horde de loups et plus encore.
Toujours en Chine, ces robots ont été améliorés et sont devenus de plus en plus menaçants. Le chien est devenu un bison!
Ce bison bionique, qui ressemble aussi à un yack, a une capacité de charge de 160 kilos et marche à quatre pattes. Il est extrêmement puissant, intelligent, et son agilité est désarçonnante!
Plus agile qu’un félin, il peut avancer, reculer, sauter, courir, tourner et même marcher en diagonale. Il a été créé pour obéir aux commandements, mais sa part d’autonomie devient de plus en plus importante. Ce qui devrait nous inquiéter.
Les missions attribuées aux robots bisons deviennent de plus en plus complexes et le prototype peut être reproduit pour créer une véritable armée de bisons bioniques.
La ligne fine de l’autonomie des robots
Il est de plus en plus difficile d’évaluer le niveau d’autonomie des robots, et de plus en plus facile de concevoir qu’on pourra un jour intégrer aux chiens-robots des fonctions de surveillance très avancées, même si ce n’était pas l’objectif de départ.
Comme pour toute innovation technologique, la vigilance sera de mise quant aux escalades des fonctionnalités qui apparaîtront, et quant au bien-fondé de ces nouvelles technologies.
Crédit Image à la Une : Osedea