Pas moins de 120 000 passagers ont pris le REM (Réseau express métropolitain) lors de la fin de semaine d’ouverture du service, sans aucune panne pour gâcher leur expérience. Mais les déconvenues qui ont suivi pourraient-elles ralentir l’élan d’intérêt que portent les usagers à ce transport, 100% électrique et 100% automatisé ?
Une période de rodage et déjà trois pannes
Le lundi 31 juillet, une panne majeure d’une durée d’1h30 est survenue entre 8h00 et 9h30 du matin, en pleine heure de pointe, forçant le rapatriement d’autobus pour en évacuer et relocaliser les passagers. Une deuxième interruption de service a été provoquée en fin de journée, en raison d’un problème similaire lié au blocage d’équipements sur les rails.
Des problèmes d’aiguillage
Sur le rail, un mécanisme d’aiguillage permet au train de changer de voie. C’est cette fonction qui a fait défaut au REM et qui a provoqué les interruptions de service lundi. Une équipe a donc dû être déployée sur le terrain pour la débloquer manuellement.
Cette situation pourrait se reproduire, mais pas sans que des ressources ne soient rapidement mobilisées pour y pallier, a indiqué sur plusieurs tribunes Jean-Vincent Lacroix, directeur des communications de la filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec, CDPQ Infra, ajoutant qu’après la période de rodage, il fallait s’attendre à atteindre, en automne, 30 000 déplacements par jour, rien que pour la Rive-Sud de Montréal.
30 000 déplacements par jour, c’est le plus grand achalandage du REM auquel on s’attend en automne
Pour éviter que ce type d’incident ne se reproduise trop souvent en hiver, des réchauffeurs d’aiguillage, fonctionnant au gaz naturel, permettront de dégager la neige et la glace des aiguillages. CDPQ Infra a également indiqué que « Chaque matin, au préalable de la mise en service, les équipes d’exploitation et de maintenance prépareront les voies selon les événements météorologiques en cours ou prévus, telles que les chutes de neige abondantes et les précipitations de glace, au moyen d’engins de maintenance spécialisés. Les passages fréquents des voitures, toutes les 2,5 minutes aux heures de pointe sur le tronçon central, permettront d’éviter des accumulations de neige trop importantes sur les voies durant les heures normales d’opération (de 5h à 1h du matin). »
Une autre mésaventure
Toujours le lundi 31 juillet, en fin de soirée, un couple de L’Île-des-Sœurs, qui se trouvait à bord de l’un des wagons, a été envoyé par erreur au garage, s’attendant à y passer la nuit.
Alors qu’ils rentraient de leur sortie cinéma au quartier Dix30, Anick Cardinal et Michel-André Grégoire sont montés à bord d’un train à la station Du Quartier en direction L’Île-des-Sœurs. Ils y ont poireauté 20 à 25 minutes, bercés par les signaux et la voix rassurante du REM, qui annonçait un prochain arrêt à la station Panama, en direction de Montréal. C’est pourtant dans la direction opposée que le train est parti, pour finir au garage.
Grâce à un interphone, le couple a pu joindre un responsable. Au bout d’environ huit minutes, le train s’est remis en marche, à reculons vers la station Brossard, où un agent de sécurité du REM attendait Mme Cardinal et M. Grégoire afin de les escorter en VUS jusqu’à chez eux.
Sur les réseaux sociaux, M. Grégoire n’a pas manqué de rappeler sa mésaventure, soulignant au passage qu’il n’était pas près de remonter à bord du REM.
Une défaillance informatique
Enfin, la troisième panne de la semaine, celle de ce mercredi 2 août, a été causée par un pépin d’ordre informatique, retardant le démarrage du service dans les deux directions d’une demi-heure, tôt le matin.
« Un problème informatique au centre de contrôle a impacté le démarrage des voitures causant une interruption de service dans les deux directions », a commenté CDPQ Infra. Pour une troisième fois cette semaine, il a donc fallu s’en remettre au « plan de relève », et ainsi mobiliser des navettes pour assurer le déplacement des usagers sur place.
Somme toute, une économie de temps
Si l’on s’attarde aux points positifs, force est de constater que l’expérience du REM s’avère déjà avantageuse pour une grande majorité d’usagers du transport en commun, qui en ont fait l’essai, et pour qui la durée du trajet entre Montréal et la Rive-Sud en est grandement écourtée.
Mais pour certains résidents de Brossard, qui avaient pour habitude de prendre la ligne d’autobus 90 ou encore la 45, et de traverser le pont sans aucune autre correspondance jusqu’à leur arrivée à la Gare centrale, le REM ne représente, pour l’instant, pas la meilleure option. C’est qu’ils doivent stationner ou marcher jusqu’à la station la plus proche, soit plus loin que lorsqu’ils n’avaient qu’à se rendre au stationnement incitatif Chevrier ou à celui du terminus Panama.
Or, en hiver, l’économie de temps sera plus évidente, puisque les chauffeurs d’autobus doivent adapter leur conduite aux conditions météorologiques, prenant parfois le double du temps pour compléter leur parcours. Avec le REM, les déplacements entre Brossard et Montréal se feront toujours en une quinzaine de minutes, beau temps, mauvais temps !
Des tarifs ni pires, ni mieux
Tel qu’indiqué par la grille tarifaire de l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), les usagers du REM ne profiteront pas de normes différentes de celles établies pour le reste du réseau de transport, puisque les tarifs prévus pour les zones A, B, C et D s’appliquent aussi au REM. C’est donc qu’il en coûtera 50 % de plus à un usager régulier du REM qui se déplacera entre Brossard et Montréal, qu’à un usager régulier ne voyageant qu’à Montréal, soit 155,00 $ plutôt que 97,00 $.
Souligné comme un inconvénient, ce point a aussi été évoqué par des usagers du métro devant payer le même tarif (155,00 $) pour un titre « tous modes AB », simplement pour se rendre de la station de métro de Longueuil à Berri-UQAM.
De plus, en prenant le REM, CScience a remarqué qu’en l’absence temporaire de tourniquets et de contrôleurs, certains usagers omettaient ou renonçaient à valider leur titre de transport auprès des bornes, réparties ici et là dans la station à cet effet — un mode de fonctionnement qui détonne de celui du métro, et qui s’apparente davantage à celui du train, où l’on peut être contrôlé ou non pour la vérification de son billet. Notons que la situation ne sera maintenue que durant la période d’acclimatation d’ici l’ajout de tourniquets.
Un enthousiasme justifié
Malgré les défaillances temporaires et les réserves soulevées par certains insatisfaits, il serait étonnant que les quelques interruptions de service des derniers jours suffisent à freiner l’engouement démontré pour le REM, quand on sait que malgré les pannes multiples et régulières du métro de Montréal, l’achalandage de ce dernier reste en hausse.
À plus long terme, le REM devrait accroître sa communauté d’usagers de plusieurs adhérents, désireux de se rendre rapidement au centre-ville de Montréal, au Quartier Dix30 ou ailleurs, sans avoir à attendre plusieurs minutes à l’extérieur, ni à subir l’embouteillage ou à enchaîner les correspondances, pour autant que les défaillances observées soient rapidement corrigées.
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Crédit Image à la Une : Chloé-Anne Touma