En ce début d’année, les dirigeants d’entreprise et les gestionnaires en ressources humaines doivent développer une vision claire quant aux effets de la robotisation et de l’intelligence artificielle sur le monde du travail.
« Le plus important, c’est d’être capable d’anticiper leur impact sur l’organisation du travail », explique Manon Poirier, directrice générale de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.
Déjà, plusieurs entreprises ont amorcé le virage technologique. Des emplois répétitifs et autres tâches récurrentes sont accomplis désormais par des robots. « Eux ne prennent pas de pause-café ni ne fument pas », avait confié en 2018, un fabricant de Laval, à l’auteure de ces lignes.
En 2021, plusieurs dirigeants s’attarderont à revoir le processus journalier des employés. « Cela permet de moduler les postes et de faire une projection des compétences que nous aurons besoin dans un avenir rapproché », ajoute Mme Poirier.
CONSERVER LES EMPLOIS
Une entreprise, par exemple, peut envisager d’ici 3 à 5 ans que la moitié des postes d’analystes financiers soit transférée à l’intelligence artificielle. Attention toutefois à la tentation de supprimer ces emplois.
« Le réflexe est trop facile de laisser partir les gens. Comme organisation, on se demande comment on peut les accompagner et les garder. Quelles compétences peut-on développer chez eux qui seront nécessaires à la réussite de l’organisation? » – Manon Poirier, directrice générale – Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.
Car ces ressources humaines sont précieuses. Chaque membre de l’équipe connait l’historique de l’organisation, ses valeurs, sa culture. « Pourquoi ne pas investir en eux? », suggère-t-elle.
PANDÉMIE
Depuis le début de la pandémie, les entreprises ont-elles devancé leurs projets d’implantation en intelligence artificielle ? Mme Poirier observe qu’un grand nombre d’entre elles travaille encore dans l’urgence en tentant de sortir leur tête de l’eau.
En attendant, plusieurs dirigeants ont implanté des outils numériques pour accélérer et améliorer le télétravail.
La Covid-19 a aussi mis une certaine pression sur les dirigeants pour investir dans l’acquisition de nouvelles technologies. « Certaines organisations ont saisi les opportunités et ont voulu revoir leurs façons de faire. Cela implique d’innover et préparer notre équipe à travailler autrement. »
TRANSPARENCE
Toutefois, l’implantation de l’automatisation ou de l’intelligence artificielle représente tout un défi alors que la majorité des employés travaillent depuis leur domicile.
Une nouvelle technologie devient parfois synonyme d’anxiété chez les employés qui se demandent s’ils seront capables de l’utiliser et surtout quel sera l’impact sur leur emploi.
Les gestionnaires en ressources humaines ont un rôle important à jouer en expliquant clairement leurs attentes.
La clé, selon Mme Poirier, réside en l’établissement de communications claires et précises axées sur la transparence. En conférence virtuelle, on explique les détails de la formation offerte aux employés, l’échéancier, etc.
« On ne peut pas improviser lorsqu’on fait un changement, dit-elle. Le choix des mots est important afin de ne pas susciter d’inquiétudes. »
ESSENTIEL
La personne responsable des ressources humaines joue un rôle essentiel. Elle identifie les enjeux de la nouvelle technologie par exemple afin d’en atténuer l’impact négatif.
Puis, elle s’assure de mettre en place les bons mécanismes pour gérer son adoption et l’adhésion au sein de l’équipe.
En réunion virtuelle, peu de gens osent lever la main et s’exprimer devant leurs collègues. « On privilégie des moyens afin que tous s’expriment de manière confidentielle et anonyme. On peut faire des sondages sur la façon dont est perçue le changement », suggère la directrice générale de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.
ENJEUX
À l’heure actuelle, la pandémie transforme les milieux de travail et surtout notre relation face au boulot. « On sent une volonté chez les gens de maîtriser davantage leur vie professionnelle et personnelle. Cela met beaucoup de pression sur les organisations qui n’auront pas le choix de maintenir le télétravail, mais peut-être pas forcément à temps plein. »
Durant les 10 derniers mois, les employés en télétravail ont prouvé leur efficacité et leur performance. La productivité est en hausse et les pertes de temps, en baisse. « Les recruteurs me disent souvent que les employés recherchent une entreprise qui offre le télétravail de façon significative », confie Mme Poirier.
Enfin, le prochain défi sera sans doute la connaissance et maîtrise de la littératie numérique. « Plusieurs postes auront une composante numérique significative d’ici un horizon de 10 ans. C’est important de développer les compétences en ce sens. C’est une responsabilité des individus et des organisations », conclut-elle.
Crédit photos : Ordre des CRHA