[INSPIRATION] Des femmes scientifiques d’origines moyen-orientale et nord-africaine témoignent

[INSPIRATION] Des femmes scientifiques d’origines moyen-orientale et nord-africaine témoignent

Le 21 juin dernier avait lieu l’événement Path to succès – Women of MENA in Tech Stories, qui soulignait le parcours de femmes accomplies d’origines moyen-orientale et nord-africaine, qui œuvrent dans le secteur des sciences, technologies, ingénierie et mathématiques (STIM). Elles y ont abordé les défis et la réalité d’être une femme dans ce domaine, souvent dominé par les hommes.

Afin de mieux comprendre les réalités des femmes en STIM, CScience s’est entretenu avec les panélistes Samira Khajehi, vice-présidente et cheffe d’équipe en innovation chez Sheertex, et Negin Ashouri, cofondatrice et directrice de la technologie chez FemTherapeutics Inc.

Les principales difficultés rencontrées

Samira Khajehi

Samira Khajehi

« C’est une combinaison de plusieurs choses. L’un des plus gros défis dont j’entends parler à répétition de la part des femmes, c’est cette idée du syndrome de l’imposteur, amène Samira Khajehi, vice-présidente et cheffe d’équipe en innovation chez Sheertex. En tant que personne qui l’a ressenti, et qui s’est sentie frustrée de le ressentir, je crois que ce sentiment vient du fait qu’il faut cesser de se retenir. Il faut faire confiance à nos apprentissages, à nos compétences et à nos expériences pour faire face à différents moments. »

« Je ne veux pas avoir à convaincre les autres de ma valeur, mais plutôt pouvoir me concentrer sur mon travail et non sur l’environnement où on ne reconnaît pas ma valeur. »

– Samira Khajehi, vice-présidente et cheffe d’équipe en innovation chez Sheertex

« En prenant ce que l’on a appris, en trouvant les bonnes personnes qui ont nos intérêts à cœur – et qui savent que nous avons les leurs à cœur -, c’est déjà une grande partie du chemin d’accompli (…) Je ne veux pas avoir à convaincre les autres de ma valeur, mais plutôt pouvoir me concentrer sur mon travail et non sur l’environnement où l’on ne reconnaît pas ma valeur », de compléter Mme Khajehi.

Negin Ashouri

Negin Ashouri

La cofondatrice et directrice de la technologie chez FemTherapeutics Inc., Negin Ashouri, amène quant à elle que « C’est difficile d’être dans cette industrie, en femtech. Il existe certaines « alliances » entre hommes dans lesquelles les femmes ne sont pas incluses, mais c’est en train de changer, graduellement. Aussi, financièrement, c’est souvent plus difficile pour les femmes. On va souvent préférer investir notre argent et notre confiance en des gens plus expérimentés, et, socialement, on a intégré que les hommes le sont davantage. Il faut changer ces mentalités parce que les femmes peuvent aussi le faire ! »

L’importance d’être soutenues

Samira Khajehi et Negin Ashouri ont toutes deux mentionné, lors de la conférence, l’importance pour les femmes d’avoir un « système de soutien». Questionnée à savoir pourquoi, Mme Khajehi a précisé que c’est « Parce que ça peut aider sur tellement de plans : amener du soutien émotionnel, de la résolution de problèmes, de la camaraderie, le sentiment de ne pas être seule, etc. Je crois qu’il y a un pouvoir dans l’idée de gens qui se rassemblent qui n’existe pas quand on travaille seul(e). Je pense donc que lorsque vous pouvez créer cette communauté autour de vous, ou trouver des communautés qui existent autour de vous, cela vous libère de vos peurs. En lien avec nos peurs et cette idée de communauté, j’essaie de me demander : ‘dirais-je la même chose à une amie qu’à moi-même?’ Être dans une communauté vous fait apprendre beaucoup de choses, dont la manière de canaliser et entendre les conseils des autres afin de surmonter des difficultés ».

Pour Mme Ashouri, « Il faut aussi souligner l’importance d’avoir ce soutien à l’extérieur de l’écosystème de travail, c’est-à-dire dans nos cercles familiaux, d’amis, etc.  D’avoir des gens qui croient en toi, en ta vision, qui t’aide à briller et à aller plus loin, c’est tellement important. »

https://www.cscience.ca/2023/04/25/portrait-farah-alibay-une-perseverance-hors-de-ce-monde/

L’avantage d’être une femme en STIM

CScience a également voulu savoir quel était, selon Mmes Khajehi et Ashouri, le plus grand avantage d’être une femme dans leurs domaines respectifs.

« Selon ma propre expérience, je dirais que les femmes ont plus tendance à se soucier du réel, a entamé Mme Khajehi. Avec tout l’effort qu’on doit mettre dans nos carrières, on sent souvent qu’il faut être plus en tant que femme : plus donner, mieux performer, etc. Nous en devenons très équipées en cours de route. Je peux vous dire que j’ai souvent été entourée d’hommes disant de nombreuses choses sans les avoir vraiment expérimentées, sans vraiment savoir de quoi ils parlaient. Il y a une force à avoir une femme dans la pièce : quand elles parlent, elles ont de l’expérience plus concrète, ce qui est un immense avantage. Je crois aussi que les femmes, parce qu’elles ont eu à travailler pour leur place, sont excellentes pour créer un espace pour les autres. C’est très généralisé, mais cette humilité que les femmes amènent est généralement plus grande que celle des hommes. »

« C’est déplorable que si peu de choses aient été faites dans ce domaine, et que, encore aujourd’hui, les femmes soient sous-représentées, ne serait-ce qu’en études cliniques. »

– Negin Ashouri, cofondatrice et directrice de la technologie chez FemTherapeutics Inc.

Negin Ashouri croit « qu’il y a deux principaux avantages. Travailler pour la santé de la femme, c’est être son propre superhéros. C’est déplorable que si peu de choses aient été faites dans ce domaine, et que, encore aujourd’hui, les femmes soient sous-représentées, ne serait-ce qu’en études cliniques. Alors être dans cet espace est particulier, mais de savoir qu’il y a une opportunité pour du changement, pour innover et pour sensibiliser est motivant et puissant. Être l’une des seules femmes dans la pièce, c’est aussi l’opportunité de montrer aux autres qu’ils ont tort de ne pas croire en la capacité des femmes d’amener du changement et d’avoir un impact sur la société, sur une communauté, ou sur tout ce qu’il est possible d’imaginer. »

Path to succès – Women of MENA in Tech Stories

Leurs souhaits pour celles qui leur succéderont

Enfin, que souhaitent les deux scientifiques aux générations futures d’entrepreneures ?

Samira Khajehi leur souhaite « tout le succès du monde! De génération en génération, les femmes de couleur se battent pour avoir la réalité que nous avons aujourd’hui. Les opportunités que nous avons aujourd’hui n’auraient peut-être même pas pu être envisagées il y a 50 ou 60 ans. Il y a encore du travail à faire, et j’espère que la prochaine génération n’aura pas à travailler aussi fort, parce que c’est brutal. »

« De génération en génération, les femmes de couleur se battent pour avoir la réalité que nous avons aujourd’hui. »

– Samira Khajehi, vice-présidente et cheffe d’équipe en innovation chez Sheertex

Negin Ashouri : Je leur souhaite le plus grand des succès. Ce que je vois surtout chez les jeunes femmes est ce désir d’être parfaite dès le début d’un projet. Ce n’est pas la façon de faire, et ça, je l’ai bien appris! *Rires* Il faut dès le départ avoir confiance en soi et confiance que, individuellement, je suis assez. Si tu es rongée par les doutes et que ceux-ci se transposent dans ton travail, cela va transparaître. Il ne faut jamais non plus craindre de demander de l’aide : on a tendance à vouloir tout faire par soi-même, mais demander de l’aide peut grandement accélérer une carrière et être la décision la plus bénéfique à prendre.

https://www.cscience.ca/2023/06/20/analyse-inclure-tous-les-genres-dans-les-ia-et-eviter-les-erreurs-du-passe/

Crédit Image à la Une : Roxanne Lachapelle