De plus en plus présente dans nos assiettes, l’intelligence artificielle a aussi fait son entrée dans le domaine du vin. CScience IA a rencontré la sommelière, entrepreneure et conférencière Jessica Harnois pour en parler.
Les IA tiennent-elles un rôle dans votre quotidien?
J’ai été confrontée à l’Intelligence Artificielle et trouvée ça très intéressant! Avec des partenaires, j’ai créé une application de jeu : Dégustation Vegas, qui s’appelle désormais Vin Mystère. Nous étions trois avant-gardistes sur ce projet, mais on s’est scindé. De leur côté, ils ont créé un logiciel pour faire de la recherche d’accords mets-vins. Encore à ce jour, ça n’est implanté nulle part; c’est encore en avance sur son temps… Moi, j’y crois beaucoup. Je pense que ça va être une avancée très appréciée par l’être humain! En fonction des besoins ou de ce qui se trouve dans le panier client, un algorithme va indiquer quel est le vin adéquat/approprié aux aliments. C’est quand même assez cool et avant-gardiste…
L’IA est-elle présente dans le monde du vin et à quel(s) niveau(x) ?
L’IA est présente à 4 niveaux! Le premier niveau dans lequel elle est très implantée, c’est celui des vignobles. Grâce à des drones qui se promènent au-dessus des vignobles et à la reconnaissance thermique et chimique, on peut détecter les défauts du vin et savoir à quel moment la vigne est prête. L’étape deux, c’est l’utilisation de l’IA au chai, quand on confectionne le vin. Je ne l’ai jamais vu moi-même, mais je suppose qu’on peut connaître ainsi le PH, l’équilibre, etc. Le troisième niveau, c’est la possibilité du mets-vin : un système intelligent lié soit à une application soit, au panier client. Finalement, l’étape quatre, c’est l’IA dans votre cave! C’est « Alfred, gestionnaire de cellier », qui va être capable de vous dire quand boire vos vins. Ça, c’est très intéressant aussi. Ce sont les 4 niveaux que je connais d’intelligence artificielle, et personnellement, je trouve ça passionnant!
Qu’est-ce que le « vin intelligent » ?
Certains vins sont dits « intelligents », car ils sont préconçus, préplanifiés, en fonction des goûts des consommateurs. L’IA fournit une sorte de recette de composition du vin dans le but de plaire à une plus vaste clientèle. C’est encore un peu nébuleux pour moi, mais l’idée est très intéressante ! L’IA permet de répondre réellement aux besoins de l’utilisateur.
Faut-il être un professionnel pour profiter des IA dans le domaine du vin?
Non, et c’est en ça que c’est intéressant! En tant que sommelière, j’aimerais bien avoir un système d’intelligence artificielle qui me fait des propositions. Une fois que j’ai les vins, je peux dire aux clients « regardez celui-ci, il est encore mieux que celui-là »… Mais il n’est pas nécessaire d’être un expert pour en profiter! Si les gens inscrivent dans Google « IA et vin », il y a de nombreuses références à des applications ou à des systèmes qui permettent de profiter du vin au maximum, comme « Alfred » pour la gestion de cellier. Ce sont des outils dans lesquels il faut investir. Mais une fois fait, il n’est plus nécessaire de consulter. On sait à quel moment boire les vins et comment les boire.
Les IA représentent-elles une menace pour l’emploi?
Pour moi, non! Je pense que c’est un ajout qui complète, mais qu’on ne pourra pas se passer de spécialistes. Les gens ne feront pas confiance à une machine. La machine, ce qu’elle fait, c’est juste généraliser. Elle ira chercher des algorithmes pour proposer plein de choses. Mais rien n’indique que l’individu va aimer un vin plutôt qu’un autre. Mais s’il connaît mon palais, il va me faire davantage confiance qu’à la machine. Il y a un lien de confiance d’humain à humain qui va toujours demeurer. Je considère que c’est une aide pour le sommelier expert : l’IA va me donner quelques propositions, et moi, avec mes connaissances, mon goût personnel et un peu de psychologie, je peux faire un meilleur choix pour le client. Je pense donc que ça va fonctionner main dans la main. On ne pourra pas se passer d’experts : c’est impossible !
À quoi ressemble l’IA du futur dans le secteur du vin ?
Je pense que le besoin premier est à la vigne! Tout commence avec les raisins. En ce moment, on mise beaucoup sur le bio, mais avec le bio, on a beaucoup plus de maladies et d’attaques à la vigne. C’est très difficile d’avoir une vue d’ensemble à moindre coût et de savoir si un raisin est en santé. C’est intéressant de voir qu’on retourne aux sources avec le bio, mais avec de l’aide technologique pour connaître rapidement l’état du raisin !
Ensuite, dans le processus de création du vin, je j’aimerais avoir un logiciel qui m’indique ce qu’aiment les clients. C’est-à-dire avoir un profil de goût. Ça permettrait de confectionner un vin plus précis en fonction des préférences actuelles, basé sur des données. Mais encore une fois, il est très important d’avoir l’être humain au bout de la démarche; je ne laisserai pas la machine en roue libre!
Enfin, pour le client, avoir des recommandations, je trouve ça très bien! Avoir un algorithme qui aide à élaborer des combos d’accords mets et vins, qui amène le consommateur à déculpabiliser et à mieux boire. Tant qu’à mieux boire, avoir le bon accord mets-vin, je trouve ça fantastique. En fonction des goûts et des achats.
Enfin, la gestion de cave. Pour ceux qui sont collectionneurs ou qui aiment avoir des vins, c’est très intéressant de posséder un logiciel qui permet de boire les vins au bon moment.