[ÉDITORIAL] : Une meilleure productivité en innovation au Québec, mais encore des défis à relever

[ÉDITORIAL] : Une meilleure productivité en innovation au Québec, mais encore des défis à relever

Investissement Québec a dévoilé ce jeudi un bilan plutôt flatteur de son initiative Productivité innovation, lancée il y a deux ans en pleine pandémie. Alors que la maturité technologique du secteur manufacturier semble confirmée et que les investissements privés pour l’adoption de technologies et procédés innovants se multiplient, quelques ombres au tableau demeurent. L’accès des entreprises à une meilleure connectivité vient ainsi questionner ce mouvement dans un autre rapport, et un autre bilan rendu publique cette semaine, celui des 5 ans du programme ENCQOR sur l’adoption de la 5G.     

Les bonnes nouvelles sont les bienvenues ces temps-ci ! Et Investissement Québec joue les pères Noël avant l’heure, en apportant du baume au cœur à l’écosystème industriel québécois qui peine encore à se remettre de deux ans de pandémie, suivie d’une inflation pour le moins ravageuse.

L’initiative Productivité innovation, mise en oeuvre à l’automne 2020, et qui visait à propulser la compétitivité et à accélérer la croissance des entreprises par la productivité et l’innovation, livre ses premiers enseignements. Et ils sont aussi encourageants que concrets, avec des solutions financières et de l’accompagnement qui ont été apportés autant en numérisation, en robotisation et en impression 3D qu’en intelligence artificielle.

Des initiatives pour améliorer la productivité

Les chiffres parlent d’eux-mêmes en terme d’actions : en deux ans, ce sont 688 projets visant un accroissement de la productivité et représentant des interventions financières de plus de 2 milliards de dollars qui ont été réalisés. Des projets dont la valeur totale dépasserait les 6 milliards de dollars.

Au cours de la même période, l’organisme d’accompagnement Investissement Québec-CRIQ a effectué 3678 interventions pour aider les entreprises à réaliser un projet technologique visant à amorcer une transformation numérique ou à automatiser des opérations. Autant dire que les équipes n’ont pas chômé sur le terrain.

« Dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre systémique, le gage de productivité dans les industries notamment manufacturières passera immanquablement par une généralisation de l’automatisation et de la robotisation. » – Philippe Régnoux, Directeur de publication CScience

Des actions qui sont pleinement alignées avec les propos du président-directeur général d’Investissement Québec, Guy Leblanc, quand il affirme que « les transitions démographique, numérique et climatique redéfinissent l’environnement d’affaires avec lequel les entreprises doivent composer », et que « plus que jamais, les entreprises ont besoin de solutions créatives, qui allient financement et accompagnement ».

Ce qu’on attend maintenant, c’est de connaître les résultats obtenus dans les entreprises financées et accompagnées en termes d’amélioration effective de productivité. Car si le Québec a rattrapé son retard depuis trois ans, selon les données publiées par Statistique Canada en mai dernier, il se classe toujours au 4ème rang des provinces canadiennes en la matière.

Accélération de la robotisation

Dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre systémique, le gage de productivité dans les industries notamment manufacturières passera immanquablement par une généralisation de l’automatisation et de la robotisation.

Là encore, une autre étude commandée par Investissement Québec à l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC), et réalisée au cours de l’été dernier, apporte des sources de satisfaction.

« Une telle croissance de la robotisation au Québec appelle le déploiement d’un réseau de connexion technologique puissant sur l’ensemble du territoire. » – Philippe Régnoux, Directeur de publication CScience

L’étude révèle en effet que, dans le cadre de l’initiative Manufacturiers innovants, qui a précédé Productivité Innovation, une tendance se dessine quant à la capacité du secteur manufacturier québécois de se mesurer aux leaders mondiaux relativement à la numérisation et la robotisation de leurs opérations, et à l’utilisation de technologies de pointe.

Ainsi, le rythme de croissance des acquisitions et installations de robots par le secteur québécois de la fabrication aurait été, entre 2014 et 2019, le plus rapide parmi les pays étudiés, supérieur même à celui de la Chine. Entre 2014 et 2019, le nombre de robots installés annuellement par le manufacturier québécois aurait même bondi de 275 %.

Un chiffre spectaculaire qui, si un tel rythme de croissance devait se maintenir, placerait le Québec en position de rattraper complètement, d’ici 2030, son retard en matière de robotisation par rapport à la moyenne mondiale.

Des défis à relever pour accompagner ce mouvement

Une telle croissance de la robotisation au Québec appelle le déploiement d’un réseau de connexion technologique puissant sur l’ensemble du territoire. Malgré le progrès mené au cours des dernières années pour la couverture 4G, du chemin reste encore à faire pour la 5G.

« Les transitions démographique, numérique et climatique redéfinissent l’environnement d’affaires avec lequel les entreprises doivent composer. » – Guy Leblanc, PDG d'Investissement Québec

A l’occasion des 5 ans du programme ENCQOR, qui a permis l’implantation de la 5G dans plusieurs centaines d’entreprises au Québec et en Ontario, force est de constater que le Canada est encore loin d’offrir une couverture optimale de ce réseau à très grande vitesse. Pourtant, ce réseau est indispensable si l’on souhaite atteindre l’ambitieux objectif de robotisation massive du Québec d’ici 2030.

Il faut donc continuer à investir dans le réseau sans-fil haute-vitesse, mais aussi former les ressources nécessaires à l’accomplissement de cette grande transformation numérique. C’est ce que nous révèlent les experts que nous avons invités cette semaine sur le plateau de l’émission C+Clair consacrée au sujet.

Espérons que les promesses de campagne du candidat Legault en septembre dernier, qui chiffraient à 3 milliards de dollars la création d’un fonds public-privé, le fonds Infrastructures et données Québec (ID Québec), visant à compléter la couverture cellulaire de la 4G et de la 5G au Québec, seront suivies d’effets.

Sinon, les robots, tout autant que les investisseurs, risquent vite de trouver le temps long.

Philippe Régnoux
Directeur de publication, CScience
p.regnoux@galamedia.ca

Crédits photo image en Une : Gracieuseté Investissement Québec