10 défis-solutions en gestion de projets TI

10 défis-solutions en gestion de projets TI

Chaque semaine, nos experts livrent leurs avis, leurs opinions sur des sujets, des thématiques qui les touchent, les interpellent. Aujourd’hui, c’est Sylvie Leduc, gestionnaire de projets, coach Agile et consultante qui vous propose d’aborder les enjeux et défis propres au secteur des technologies de l’information (TI), du point de vue des solutions prescrites par l’approche Agile.

Pour cette seconde chronique, j’ai cru pertinent de ratisser plus large que sur l’ensemble des principes et valeurs Agile, et d’aborder les défis et solutions proposées en gestion de projets TI, nonobstant les méthodes et pratiques qui y sont consacrées.

L’intelligence artificielle et le manque de formation

En effet, l’introduction de l’intelligence artificielle (IA) dans le domaine de la gestion de projet va complètement changer la donne, puisqu’elle agglomérera les données capturées sans créer de silos entre les méthodes d’exécution. Compte tenu de la controverse des récentes semaines suivant la lettre ouverte du 22 mars dernier, publiée sur le site du Futur of Life Institute, demandant un moratoire sur les travaux de grande envergure d’expérimentations en intelligence artificielle, la pertinence était de mise.

« (…) seulement 35% des projets sont complétés avec succès. L’une des principales raisons énoncées pour justifier ce piètre taux de succès repose sur le bas niveau de maturité des technologies disponibles en gestion de projet. »

Quelques jours plus tard, je participais à un webinaire qui me donnait l’inspiration pour ce titre et son contenu. Le conférencier-présentateur était nul autre qu’Antonio Nieto-Rodriguez, considéré comme le champion mondial en gestion de projet et auteur du Manuel (Handbook) de la gestion de projet, publié par le Harvard Business Review en 2021. Son dernier article de février dernier, dans la publication électronique de la même université, touche à la façon dont l’IA transformera la gestion de projet d’ici 2030. L’article débute en annonçant clairement qu’en ce moment, seulement 35% des projets sont complétés avec succès. L’une des principales raisons énoncées pour justifier ce piètre taux de succès repose sur le bas niveau de maturité des technologies disponibles en gestion de projet.

Je ne les nommerai pas ici. N’empêche, certains des logiciels plus communément utilisés sont en effet archaïques, et les promoteurs de projets assument que tous les utilisateurs (pensons donc aux membres de l’équipe de projet) ont été adéquatement formés pour bien les utiliser. Pas nécessairement, malheureusement… Et je parle, ici, tant des logiciels utilisés à l’application des méthodes relevant de l’approche Classique que de celle dite Agile. Logiciels désuets et mal utilisés ne donneront pas les résultats escomptés.

Un plan stratégique boiteux

Au cours de ce même webinaire, l’un des autres premiers constats amenés à la table par Antonio Nieto-Rodriguez se rapportait au nombre de projets que les sociétés mettent de l’avant, sans valider l’arrimage (le « fit ») de ces mêmes projets relativement au plan stratégique de ces sociétés, normalement développé en amont de leur nouvelle année fiscale. Je souligne ici que ces données s’appliquent à tous les types de projets, peu importe les méthodologies et pratiques sur lesquelles reposent leur exécution : Classique, Agile, PRINCE2®, Hybride, Vagues Déferlantes, etc.

« Au Québec, je crains que les retards de nos projets en transformation numérique, de tout acabit, créent ces mises en œuvre à la hâte. Ajoutez à cela la pénurie de main d’œuvre pour les exécuter, et nous nous retrouvons avec un taux d’échec de projets élevé et des sommes d’argent dépensées, possiblement inutilement, ou dont le retour sur investissement est plus long que prévu. »

Au Québec, je crains que les retards de nos projets en transformation numérique, de tout acabit, créent ces mises en œuvre à la hâte. Ajoutez à cela la pénurie de main d’œuvre pour les exécuter, et nous nous retrouvons avec un taux d’échec de projets élevé et des sommes d’argent dépensées, possiblement inutilement, ou dont le retour sur investissement est plus long que prévu. Bien entendu, le contexte pandémique a aussi contribué à ce retard.

Je me rappelle que dans un article antérieur, également publié par Harvard à la fin 2021, M. Nieto-Rodriguez avait débuté avec ce même cri d’alarme sur les décevantes statistiques. On y lisait aussi la notion d’une macro-économie de projets, déclassant une économie opérationnelle, comme engin de croissance de nos sociétés pour les années à venir.

Donc, avant de débuter un projet, cette image d’un canevas de projet vaut mille mots, bâti sur de bonnes pistes de réflexion pour atteindre un consensus à l’issue d’une rencontre exploratoire avec toutes les parties prenantes. C’est crucial et prioritaire, si le projet NE FAISAIT PAS PARTIE DU PORTEFEUILLE DE PROJETS dans l’écran radar de votre société, lors de l’élaboration de son plan stratégique.

Les modèles d’Antonio Nieto-Rodriguez sont extraordinaires, mais ne sont malheureusement pas disponibles en français. Alors, j’ajoute ici deux éléments essentiels : les investissements et bénéfices relevés au travers de ses travaux.

Investissements te bénéfices

Ces données essentielles sont normalement incorporées dans le dossier commercial (« Business Case »), qui devient un document vivant et non présenté, lors du discours de vente du projet, communément appelé « pitch », pour être ensuite mis en veille sur un serveur…

Voici les dix défis auxquels vous serez confronté tout au long de l’exécution de votre projet, et dont nous nous limiterons à en analyser que cinq, pour une lecture plus concise.

10 défis

1. Dans quel contexte le projet est immergé?

Votre projet ne devrait pas être mené en silo, ni en créer un autre. Il s’insère dans le plan stratégique du contexte global de votre entreprise.

Divers facteurs extrinsèques vont l’influencer, et ces mêmes facteurs seront influencés par votre projet en retour. L’analyse du contexte ne doit pas se faire seulement sous l’angle géographique, mais aussi sous les angles suivants : politique, économique, social, technologique, environnemental, social, propre à la gouvernance (ESG), légal et/ou réglementaire.
Dans le canevas d’Antonio, il s’agit de la Fondation/L’objectif, plus holistique. Le pourquoi du projet. C’est votre courroie d’engagement.

Tout au cours de l’exécution, il est vital de le rappeler fréquemment; vous devez voir ceci comme étant le PHARE de l’équipe de projet lorsqu’il y a tempête. Vos ressources sont demandées de part et d’autre : les messages à bonne fréquence bien faits, bien dosés, avec une bonne trame d’appréciation et d’humanité sur leur contribution collective, seront appréciés. Indispensable, peu importe les méthodes, pratiques ou cadres de travail sollicités pour l’exécution.

2. À quels besoins, problèmes et opportunités répond le projet ?

Nous sommes ici dans la portée macro du projet. Advenant un projet de moyenne ou longue durée (3 mois ou plus approximativement) il est impératif de valider et s’assurer de la relevance évolutive de ces éléments principalement dans des changements accélérés se retrouvant fréquemment dans des marchés d’exploitation perturbés.
Des ajustements seront possiblement à apporter. Le cadre de travail Agile facilite les pivots potentiels et exécutant sur des sprints de deux semaines – trois semaines si vous avez atteint une maturité en Agilité.

3. Qui sont les usagers, clients et bénéficiaires du projet?

Vos usagers ne sont pas nécessairement vos clients, et vice-versa. Un projet mis en œuvre pour répondre à une nouvelle loi ou un règlement bénéficiera aux usagers, clients, organismes de réglementation, certains services opérationnels de votre société tel les Finances, le Contentieux, etc…

Le cadre de travail Agile, avec ses travaux solides en cartographie des « personnalité-utilisateurs », devient votre allié, et ces personnes sont consultées tout au long du projet afin de valider les avancées des travaux. Dans le cadre de travaux en TI, l’utilisation des fonctionnalités développées dans un environnement isolé de type « carré de sable » est primordiale, et doit être suivie de la rétroaction ponctuelle des usagers. On déploie, on inspecte et on adapte.

4. Comment le projet sera-t-il communiqué et livré?

Nonobstant le cadre d’exécution, un plan de communication bien étoffé est un impératif. Les divers outils électroniques à favoriser font l’objet de discussions lors de la rencontre de lancement, et obtiennent consensus au sein de la société.

Le contenu itératif doit être modulé selon un nombre de critères dont la majorité se retrouvent ici. À cela, il faut ajouter l’environnement de travail et les composantes matérielles propres aux diverses grappes d’utilisateurs à qui ces diverses pièces de communication seront destinées.

Dès que les travaux menés à l’avant-scène et à l’arrière-scène sont terminés et déployés en phase « test », il devient nécessaire de partager les détails préliminaires sur le mode et les étapes de livraison du projet. Sonder le pouls des usagers, clients, bénéficiaires du projet, ainsi que toute autre partie prenante, sur la livraison envisagée, devrait débuter à ce stade-ci.

5. Quel est le contenu et quels sont les livrables du projet?

Directement en lien avec le pourquoi du projet, nous sommes dans ce qui est tangible. Dans ce contexte, la technique MoSCoW (utilisée tant en mode Classique qu’Agile) est souvent très efficace pour établir les priorités des besoins ou des exigences, pour tous les types de travaux de développements numériques. Ajoutez à cela un consensus sur les critères d’acceptation des travaux, rattachés directement aux requis, puis la définition de l’état « terminé » pour qualifier le livrable, et vous évitez beaucoup d’accrochages

Dans notre prochaine chronique, nous poursuivrons avec les défis 6 à 10, en concluant avec les valeurs.

6. Quelles sont les différentes parties prenantes du projet?

7. Avec qui et quoi le projet sera réalisé, et dans quels délais?

8. Comment s’assurer que le projet sera bien exécuté et sans heurts?

9. Les investissements

10. Les bénéfices

Dans la chronique suivante, nous conclurons sur les plus importantes raisons de faire ce travail préparatoire à la venue de l’intelligence artificielle en gestion de projet. J’espère vous avoir mis l’eau à la bouche!

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Crédit Image à la Une : Paymo, Unsplash