Les QR codes augmentés, alternative aux codes-barres et outil d’économie circulaire

Les QR codes augmentés, alternative aux codes-barres et outil d’économie circulaire

Et si les codes-barres disparaissaient de nos produits, progressivement remplacés par des QR codes augmentés ? C’est une réalité qui se dessine à l’horizon 2027, partout dans le monde. Ce nouveau moyen d’identification des produits promet de favoriser l’économie circulaire. CScience a échangé avec Laurent Berns, Paul Bounaud et Benjamin Gallo, trois experts de cette transition.

Des bagages perdus aux produits de grande consommation

Laurent Berns est le co-fondateur de QR Post, une marque de l’éditeur de logiciel de traçabilité PCRM. Sa solution permet d’identifier, de suivre et d’interagir avec des produits grâce à un QR code unitaire, à l’inverse d’un code-barres fixe qui identifie un produit par série. Un QR code, ou quick response code (code à réponse rapide), est un type de code-barres à deux dimensions dont les points définissent l’information que contient le code. 

Laurent Berns a co-fondé PCRM, un éditeur de logiciel basé à Paris et à Montréal. Crédit photo : Laurent Berns

« Notre métier, c’est aiguilleur de contenu intelligent. On créé un passeport produit qu’on va pouvoir enrichir durant toute sa durée de vie pour contextualiser sa lecture et produire une information différenciée. », indique l’entrepreneur. Lancé en France en 2022, il est aussi présent au Canada depuis quelques mois.

« On créé un passeport produit qu’on va pouvoir enrichir durant toute sa durée de vie pour contextualiser sa lecture et produire une information différenciée. »

— Laurent Berns, co-fondateur de la marque QR Post

L’anecdote à l’origine de ces QR codes augmentés vient d’un échange à l’aéroport avec son épouse. « Un jour, en attendant nos valises, elle imagine un QR code qui permettrait de localiser automatiquement les bagages en cas de perte », sourit-il.

Depuis, il a vendu près de 80 000 QR Post personnalisés à différentes structures – aéroport, tours opérateurs, agences de voyages – mais aussi des sociétés d’autres secteurs qui cherchaient un nouvel objet de communication innovant et utile. Il a rejoint depuis peu la communauté des partenaires de GS1, l’organisation internationale neutre et à but non-lucratif spécialiste mondiale de l’identification produit, pour participer à la création d’un QR code standardisé.

Passer d’un code-barres en série et statique, à un passeport numérique unique et réactif

GS1, pour Global Standard One, a été créée il y a près de 50 ans par une poignée d’entreprises pour faciliter et automatiser leurs échanges en s’appuyant sur un système d’identification unique. « C’est un lieu de décloisonnement et de collaboration qui rassemble des industriels et des parties prenantes issues d’une grande diversité de filières. » explique Paul Bounaud, directeur du déploiement au sein de GS1 France.

« C’est un lieu de décloisonnement et de collaboration qui rassemble des industriels et des parties prenantes issues d’une grande diversité de filières. »

— Paul Bounaud, directeur du déploiement de GS1 France

Dans les années 1970, c’est le code à 13 chiffres et son code-barres associé qui prime pour identifier les produits de grande consommation et faciliter leur passage en caisse. Il devient rapidement le standard d’identification GS1 le plus répandu et le plus connu : le GTIN, pour Global Trade Item Number, aussi connu sous son ancien nom de code EAN, GENCOD ou UPC pour les plus experts.

Paul Bounaud travaille au sein de GS1 France depuis plus de treize ans. Crédit photo : Paul Bounaud

Depuis, ce standard GS1 – qui s’est aussi étendu à d’autres produits tels que les billets de banque, les produits de santé, ou encore les équipements de sécurité – est utilisé par deux millions d’entreprises dans le monde qui scannent quotidiennement dix milliards de codes-barres. « Nous sommes devenus leader de fait, par la volonté de nos adhérents », souligne Paul Bounaud.

Mais voilà, les technologies ont connu des avancées sans précédent depuis les années 1970. Elles ouvrent aujourd’hui un large champ de possible en matière d’identification produit pour répondre aux différents enjeux sociaux et environnementaux. C’est pourquoi les entreprises de la gouvernance de GS1 International, composée de 15 géants de la grande distribution tels que Johnson & Johnson ou Carrefour, ont acté le passage au QR Code augmenté GS1 d’ici trois ans.

« Il est bel est bien entériné que tous les points de vente dans le monde devront être en capacité de lire un QR Code augmenté GS1, avec fin 2027 en ligne de mire », confirme Paul Bounaud. Il ajoute néanmoins qu’une période de coexistence « de plusieurs années » entre l’identification par codes-barres et par QR codes est à prévoir, et que GS1 s’attèle d’ores et déjà à préparer les entreprises à cette transition.

« Il est bel est bien entériné que tous les points de vente dans le monde devront être en capacité de lire un QR code augmenté GS1, avec fin 2027 en ligne de mire. »

— Paul Bounaud, directeur du déploiement de GS1 France

Vers une plus grande sécurité alimentaire et une plus longue durée de vie des produits textiles

Cette décision de la gouvernance GS1 vise à favoriser la transition vers une économie plus circulaire, et ce de plusieurs façons. Cette approche innovante assurerait par exemple une plus grande sécurité alimentaire. Si un produit présent dans les rayons des supermarchés est jugé impropre à la consommation, le QR code augmenté peut être modifié instantanément à distance afin d’en stopper la vente. Lors du rappel du produit, les personnes peuvent vérifier à leur domicile en scannant le QR code avec leur téléphone portable s’il fait partie de ceux jugés impropres à la consommation.

Benjamin Gallo pilote la communauté des partenaires de GS1 France. Crédit photo : Benjamin Gallo

« Il y a un enjeu global pour un impact local », ajoute Laurent Berns. Le QR code augmenté apporterait également une dimension plus éthique dans la filière textile. Il favoriserait la revente du vêtement, permettrait de mettre à jour son carnet d’entretien, ou encore d’associer « un passeport carbone », indiquant l’empreinte écologique de chaque pièce. « L’identification n’est plus statique, mais dynamique et réactive », souligne le co-fondateur de QR Post.

« Le QR code augmenté rendra l’information plus accessible pour le consommateur avec une sécurité alimentaire accrue grâce à des rappels de produit plus ciblés, augmentant le niveau de confiance. », évoque Benjamin Gallo, directeur des partenariats de GS1 France. L’arrivée du QR code augmenté coïncide également avec « la course à la revendication en matière de circularité » rappelle-t-il.

En rendant l’information plus accessible, mais aussi plus complète et ludique pour les consommateurs, ce nouveau moyen d’identification permet aussi aux distributeurs de mettre en avant la circularité de leurs produits. « Le QR code augmenté favorise l’engagement du consommateur. Ce passage aux données dynamiques lui donne plus de pouvoir sur le choix de ses produits » conclut-il. Un premier pas, donc, pour garantir une alimentation plus responsable et une industrie textile plus éthique avec un double engagement distributeur-consommateur.

« Le QR code augmenté rendra l’information plus accessible pour le consommateur avec une sécurité alimentaire accrue grâce à des rappels de produit plus ciblés, augmentant le niveau de confiance. »

— Benjamin Gallo, directeur des partenariats de GS1 France

Une décision qui accompagne les ambitions françaises et européennes

Le passage au QR code permet aussi d’amplifier les différentes réglementations de la France et de l’UE, et particulièrement la portée de la loi AGEC « Anti-gaspillage pour une économie circulaire » votée en 2020. « Le QR code permet d’apporter l’information directement au consommateur, tel que la manière dont l’emballage doit être recyclé » souligne Benjamin Gallo. L’impact des déchets sur l’environnement peut être drastiquement réduit. « Avec de nouveaux marqueurs sur les emballages, nous pouvons renforcer l’efficacité des centres de tri et améliorer sensiblement notre capacité à recycler », ajoute Laurent Berns.

Benjamin Gallo pilote la communauté des partenaires de GS1, composée principalement d’éditeurs de logiciels tels que QR Post, mais aussi de spécialistes de l’équipement informatique ou encore de cabinets de conseils. « Nos partenaires interviennent sur les 18 filières de nos 58 000 adhérents », souligne-t-il. Ainsi, cette nouvelle forme d’identification accompagne l’obligation réglementaire pour les vignerons de fournir la liste complète et détaillée des ingrédients et des valeurs nutritionnelles de leurs produits, illustre Paul Bounaud, spécialiste de la filière.

« Avec de nouveaux marqueurs sur les emballages, nous pouvons renforcer l’efficacité des centres de tri et améliorer sensiblement notre capacité à recycler. »

— Laurent Berns, co-fondateur de QR Post

Aujourd’hui, la tendance est à l’adoption du QR code augmenté dans un grand nombre de filières. « Souvent, les entreprises l’ont soit déjà mis en place – à l’instar de L’Oréal, Décathlon, Savencia ou encore Monoprix – soit vont bientôt passer le pas », explique le directeur du déploiement de l’organisme, rappelant que « le rôle de GS1 est d’accompagner ses adhérents dans ce virage vers l’économie circulaire que beaucoup de consommateurs connaissent. » Il explique que toutes les entreprises ont à coeur de faire valoir la qualité et l’éthique de leur marque, en mettant en avant leur performance environnementale.

« D’ici trois à cinq ans, l’intelligence artificielle pourrait venir renforcer la performance de ce nouveau mode d’identification produit, notamment pour automatiser le contenu personnalisé lié au QR code en fonction de la réglementation ou de la langue utilisée. » conclut Paul Bounaud. Un outil pour le moins encourageant qui dessine une économie de demain plus circulaire.

Pour aller plus loin :

Le rôle crucial de la recherche pour soutenir une économie circulaire et durable

Crédit Image à la Une : PCRM