L’intelligence artificielle au service des architectes

L’intelligence artificielle au service des architectes

Lorsqu’elle n’est pas crainte ou perçue comme une menace pour leur emploi, l’IA peut aider les professionnels à gagner du temps, en les assistant dans la réalisation de leur travail. La plateforme innovante de Maket Technologies, sélectionnée dans la catégorie « Innovation en Intelligence Artificielle » lors du dernier Gala des Prix Innovation de l’ADRIQ, en est un bon exemple. CScience s’entretient avec son cofondateur, Stéphane Turbide, pour démystifier ce qu’implique l’innovation en IA lorsque mise au service des architectes.

Maket est une plateforme infonuagique innovante qui permet aux architectes et aux technologues en architecture d’automatiser le processus de création des plans d’architecture résidentielle. Grâce à son système d’intelligence artificielle, l’outil offre la possibilité de générer des plans d’architecture, d’agir tel un assistant virtuel aux architectes et de suggérer des designs intérieurs.

Cette solution innovatrice se veut un outil d’aide à la conception plus qu’un outil de conception. Maket, qui compte à ce jour plus de 88 000 utilisateurs, a été sélectionnée dans la catégorie « Innovation en Intelligence Artificielle » lors du 33e Gala des Prix Innovation de l’ADRIQ.

La technologie comme accélérateur de la créativité architecturale

Analyser les besoins d’un client et les transférer à un plan est un long processus, pouvant prendre près d’une vingtaine d’heures de travail à un architecte, et occasionner des délais de plusieurs semaines. « Au lieu de produire un concept en m’assurant d’être certain que c’est ce concept-là qui convient, le design génératif peut en produire une centaine dès le début du projet et aller tout de suite cerner des choses qui fonctionnent dans certains plans et des choses qui fonctionnent moins », explique Stéphane Turbide, cofondateur de Maket.

Autrement dit, les suggestions de l’IA permettent à l’architecte de trouver plus rapidement une première solution qui convienne au client : « Ça permet de prendre des décisions super rapidement et de pouvoir explorer des concepts et des technicalités tout aussi rapidement. On vient éliminer le risque de prendre du temps à faire des choses que, finalement, le client ne voudra pas », ajoute-t-il.

Si les fonctionnalités premières de Maket ciblent davantage les professionnels de l’architecture, certaines d’entre elles peuvent aussi aider les clients. Entre autres, par les différents plans et designs générés, l’utilisateur client peut mieux cibler les besoins de son projet, mettre sur papier (ou sur numérique) ses idées et mieux comprendre le réalisme de son projet, l’aidant ainsi à se préparer à une potentielle rencontre avec un architecte.

De l’IA et des défis

Pour construire des algorithmes efficaces, Maket s’est dotée d’une base de données grâce à des partenariats avec de grandes entreprises qui ont des décennies de plans de maison à leur actif. Malgré une forte base de données, travailler avec de l’IA a nécessité un entraînement et un renforcement accompagné par l’intervention humaine. Des plans ont d’ailleurs été annotés pour aider l’outil d’IA à comprendre la logistique de ceux-ci et à reconnaître les différents types de pièces et leurs agencements fréquents.

« C’est plus fréquent (pour l’IA) de pouvoir reconnaître des chiffres et des patterns, mais quand on parle de design, il n’y a pas nécessairement de structures faites. Il faut entraîner les algorithmes pour qu’ils puissent non seulement reconnaître des contraintes, mais aussi reconnaître des caractéristiques et des choses qui font en sorte qu’un plan soit plus aimé qu’un autre (et) soit fonctionnel en bout de ligne », avance Stéphane Turbide.

Il aura fallu près de deux ans pour développer les algorithmes en s’assurant que le résultat respecte les contraintes imposées par le domaine architectural. Maket aurait aujourd’hui un taux de succès variant environ entre 75 et 90 %.

L’éthique dans l’innovation architecturale

Créer des algorithmes basés dans un domaine artistique peut être un terrain glissant, ce qui explique que des discussions avec les ordres des technologues et des architectes, pour des questions de droits d’auteur, soient nécessaires à la création d’un tel outil. Aussi, les algorithmes de Maket sont entraînés afin de ne pas reproduire deux fois le même concept.

Stéphane Turbide

Un plan d’architecture se divise en trois principales phases : la phase de conception, de préliminaires et d’exécution. « Maket reste dans cette première phase qui relève plutôt de l’idéalisation et du brainstorming. C’est indépendant des plans techniques, qui nécessitent l’approbation et le sceau d’un architecte.

Lors de sondages menées au sein d’entreprises et d’écoles, 20% des personnes rencontrées se montraient très enthousiastes face à ce type d’outil, tandis que 20% ne s’en disaient que curieuses, mais plus sceptiques quant à ce que l’intelligence artificielle peut apporter dans un domaine complexe comme celui de l’architecture. Enfin, 60% des répondants rapportaient se poser des questions conflictuelles et teintées de craintes.

L’IA pour une conception intelligente des logements

Avec les crises mondiales du logement et le besoin de créer des villes plus intelligentes et mieux optimisées, automatiser l’optimisation est une avenue intéressante pour le futur, croit M. Turbide : « D’ici 2030, il va manquer des millions et des millions de logements qui sont bien conçus et bien optimisés. On a une place limitée sur la terre et on ne pourra pas construire continuellement de nouvelles choses. Lorsqu’il s’agit de trouver la bonne solution, qui fitte sur le bon terrain, c’est là que l’intelligence artificielle devient très pertinente. »

Les avancées technologiques sont prometteuses en conception, mais aussi en construction. Récemment, les premières maisons faites à partir de technologies de « 3D building » ont été construites aux États-Unis. Une avenue prometteuse d’un futur où il sera possible de développer et « de construire des bâtiments plus petits et mieux optimisés, en quelques jours au lieu de quelques semaines », conclut le fondateur de Maket.

Crédit Image à la Une : Pexels

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