La résistance aux antimicrobiens est une préoccupation majeure de la santé publique mondiale, transcendant les frontières nationales et affectant divers secteurs. Une approche globale impliquant les gouvernements, l’industrie pharmaceutique et les professionnels de la santé est essentielle pour protéger la population contre les maladies infectieuses. Devant cette urgence, des initiatives concrètes prennent forme pour contrer cette menace silencieuse. La surveillance antimicrobienne et l’antibiogouvernance apparaissent comme des piliers essentiels dans la gestion de la résistance aux antibiotiques, visant à instaurer des pratiques de prescription judicieuses, renforcer la prévention des infections, et améliorer la gestion globale des antimicrobiens.
La surveillance et la gouvernance comme piliers de la gestion de la résistance aux antimicrobiens
Dans la lutte mondiale contre la résistance aux antimicrobiens (RAM), les gouvernements et les organisations de santé intensifient leurs efforts pour évaluer les risques croissants pesant sur la médecine moderne et la santé mondiale. Selon Martin Chicoine, microbiologiste expert en procédés pharmaceutiques et biotechnologiques innovants ,« La surveillance antimicrobienne et la gouvernance concernent l’ensemble des acteurs de la santé, englobant les prescripteurs tels que les médecins et les vétérinaires, les professionnels de l’agronomie, les agriculteurs, les responsables des usines de transformation des aliments, les pharmaciens mais aussi les patients, et les instances gouvernementales. »
« Ces démarches nécessitent une action concertée, car les microorganismes, omniprésents et ubiquitaires transcendent les frontières, soulignant ainsi la nécessité d’une collaboration globale. »
– Martin Chicoine, microbiologiste expert en procédés pharmaceutiques et biotechnologiques innovants
La collaboration entre ces différents acteurs est essentielle pour mettre en place des pratiques de prescription judicieuses, renforcer la prévention des infections et améliorer la gestion globale des antimicrobiens. « Ces démarches nécessitent une action concertée, car les microorganismes, omniprésents et ubiquitaires transcendent les frontières, soulignant ainsi la nécessité d’une collaboration globale. »
Un plan d’action pancanadien contre la résistance aux antimicrobiens
Afin de faire face à cette réalité préoccupante, le gouvernement canadien a lancé un plan d’action ambitieux couvrant la période de 2023 à 2027. Intitulé « Lutter contre la résistance aux antimicrobiens et optimiser leur utilisation : un cadre d’action pancanadien », ce plan vise à coordonner une réponse pancanadienne accélérée contre la résistance aux antimicrobiens, considérée comme l’une des principales menaces sanitaires de notre époque. Cette stratégie repose sur l’approche « One Health » (une seule santé), qui reconnaît l’interconnexion entre la santé humaine, animale et environnementale. Au cœur de ce plan, la surveillance antimicrobienne et l’antibiorésistance se profilent comme des instruments stratégiques incontournables, remodelant la façon dont les décideurs appréhendent, anticipent et font face aux défis de plus en plus complexes engendrés par la résistance aux antimicrobiens.
Au Québec par exemple, la résistance aux antibiotiques est devenue une préoccupation majeure, avec une diminution alarmante de la disponibilité d’antimicrobiens efficaces. « Les CIUSSS (Centres intégrés universitaires en santé et services sociaux) regorgent de documents internes, dévoilant une abondance de directives et recommandations. Cependant, la décision finale repose toujours sur l’humain, guidé par son éthique et ses valeurs », explique Martin Chicoine.
La surveillance antimicrobienne : catalyseur stratégique dans la lutte contre la résistance aux antibiotiques
La surveillance antimicrobienne joue un rôle pivot dans la lutte contre la résistance aux antibiotiques en collectant des données cruciales sur l’utilisation de ces médicaments, les résistances émergentes et l’efficacité des traitements. « Dans des situations d’urgence, la compréhension de la spécificité des antibiotiques est cruciale pour garantir le traitement approprié, et donc de l’importance d’une diligence accrue dans la prise de décisions médicales », amène M. Chicoine.
Au-delà de sa fonction de collecte de données, la surveillance se révèle être un catalyseur stratégique, fournissant des informations détaillées sur plusieurs aspects cruciaux de la lutte contre la résistance antimicrobienne. Elle scrute de manière minutieuse l’utilisation des antibiotiques, offrant une évaluation précise des schémas de prescription et d’utilisation dans divers contextes de soins de santé. Cette analyse approfondie permet une compréhension nuancée des tendances émergentes et des pratiques à risque, jetant ainsi les bases nécessaires pour des interventions ciblées. Grâce à cette capacité anticipative, la surveillance devient l’épine dorsale d’une approche proactive essentielle à la préservation de l’efficacité des traitements et à la garantie de la santé mondiale face à cette menace perpétuelle.
La gouvernance : un cadre réglementaire pour une utilisation responsable des antimicrobiens
La gouvernance, à travers l’établissement de cadres réglementaires et de directives, érige un environnement structuré destiné à encadrer l’utilisation des antimicrobiens. Ces règles définissent des normes claires en matière de prescription, de délivrance et d’utilisation des antibiotiques, façonnant ainsi un paysage réglementaire visant à promouvoir une utilisation judicieuse de ces médicaments dans divers contextes de soins de santé. « L’antibiogouvernance représente un ensemble de mesures cruciales visant à contrecarrer l’émergence de microorganismes résistants à un ou plusieurs antibiotiques. » explique Martin Chicoine. Selon le microbiologiste, « cette approche préventive est particulièrement importante, notamment dans les unités de gériatrie aux prises avec la bactérie Clostridium et dans la lutte contre l’explosion du nombre de pneumonies à Pseudomonas aeruginosa. »
En favorisant une approche coordonnée et harmonisée, la gouvernance s’efforce d’optimiser l’utilisation des antibiotiques, de réduire les pratiques inappropriées et, par conséquent, de minimiser les risques de développement de la résistance antimicrobienne.
« Cette démarche requiert une action concertée, car les microorganismes, omniprésents et ubiquitaires, transcendent les frontières, soulignant ainsi la nécessité d’une collaboration globale », ajoute Martin Chicoine.
La recherche et le développement au cœur de la lutte contre la résistance antimicrobienne
Au cœur de la bataille contre la résistance antimicrobienne, la recherche et le développement occupent une place cruciale, avec des investissements nationaux et internationaux visant à approfondir notre compréhension de cette menace mondiale et à élaborer de nouveaux antimicrobiens, substituts, et diagnostics précis. Les laboratoires bioMérieux, particulièrement engagés dans cette lutte, placent le diagnostic au cœur de la gestion des agents antimicrobiens, en développant des solutions innovantes permettant de renforcer ainsi la capacité des laboratoires à soutenir efficacement les programmes d’antibiogouvernance. « Les avancées dans l’utilisation de l’IA ou intelligence augmentée ou artificielle offrent la possibilité de concevoir des algorithmes de décision logique pour les prescripteurs. Il devrait être rendu obligatoire, dans certaines situations, de recourir aux tests diagnostiques plutôt que de prescrire des antibiotiques à large spectre », souligne Martin Chicoine.
La lutte contre la résistance aux antimicrobiens nécessite une action concertée de tous les acteurs impliqués dans le domaine de la santé. La surveillance et la gouvernance sont les piliers essentiels de cette approche globale, visant à préserver l’efficacité des antibiotiques et à prévenir l’émergence de bactéries résistantes. « Un éventail de mesures doit être déployé pour une prise de décision médicale éclairée. Cela va des conseils aux patients pour qu’ils suivent intégralement leur prescription, à l’arrêt impératif de pratiques préjudiciables, telles que l’ajout d’antibiotiques dans l’alimentation du bétail pour accélérer l’engraissement », conclut le microbiologiste Martin Chicoine.
Crédit Image à la Une : CDC, Unsplash
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