Une intelligence artificielle sera à la tête d’un parti politique au Danemark

Une intelligence artificielle sera à la tête d’un parti politique au Danemark

On se croirait presque dans un film de Denis Villeneuve, mais c’est pourtant réel : un parti danois souhaite être élu avec une intelligence artificielle (IA) à sa tête.

Le Parti synthétique fondé par un collectif d’artistes (Computer Lars) propose un candidat nommé Leader Lars comme représentant. Une intelligence artificielle conçue et programmée par le collectif.  « Lars » étant le prénom le plus populaire au Danemark, le nom de l’IA doit résonner auprès des citoyens.

L’objectif du groupe est de « mettre en relation l’IA et l’humain pour comprendre ce que les gens pensent réellement de la politique et aller à contre-courant du discours politique dominant », comme Asker Bryld Staunaes, représentant du collectif d’artistes, l’a relaté au Figaro.

Plateforme électorale éclectique

Le collectif a compilé les demandes de tous les partis politiques non élus du Danemark dans les 50 dernières années. Ses membres ont intégré le tout dans l’IA, qui a fait des choix parmi les propositions pour en faire la plateforme électorale du parti. Les électeurs peuvent même discuter avec Leader Lars via Discord (un logiciel de messagerie instantanée). Le but ? Rejoindre le 10 % de la population qui ne vote pas en proposant de nouvelles idées.

« Nous espérons que le Parti synthétique pourra faire évoluer le système politique établi vers quelque chose qui soit capable de représenter des citoyens très différents et leurs visions politiques », explique Asker Bryld Staunæs au Courrier international.

« À ce jour, les partis politiques au Canada n’utilisent pas directement l’IA (selon la définition retenue), mais utilisent des modèles statistiques sophistiqués pour segmenter/cibler l’électorat et comprendre quelles positions sont populaires ou non, et ce, parmi différents groupes sociodémographiques. »

– Benjamin Ferland, professeur agrégé à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa

Éthiquement électoral ?

Au Canada, les lois stipulent que « Tout citoyen canadien a le droit de vote et est éligible aux élections législatives fédérales ou provinciales. La Loi électorale indique que les critères d’éligibilité pour être candidat(e)s aux élections se réfèrent à une personne », selon Benjamin Ferland, professeur agrégé à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Il faut donc que le parti soit fondé par des « humains », mais rien n’empêche une IA d’en être leur représentant, que ce soit au Danemark ou au Canada.

ben_pic

Benjamen Ferland

D’ailleurs, il y a déjà eu quelques tentatives du même acabit auparavant, ailleurs dans le monde. Par exemple, une IA a représenté les élections municipales au Japon en 2018, tandis que Vladimir Poutine a dû affronter un chatbot russe nommé Alissa lors des élections de la même année, et les électeurs néozélandais ont pu voter pour un chef politique virtuel nommé Sam aux élections de 2020.

Selon le Parti synthétique danois, la nouveauté de leur projet réside dans le fait de ne pas seulement présenter un leader virtuel, mais plutôt que l’intelligence artificielle a été à la base de la création de leur plateforme.

« À ce jour, les partis politiques au Canada n’utilisent pas directement l’IA (selon la définition retenue), mais utilisent des modèles statistiques sophistiqués pour segmenter/cibler l’électorat et comprendre quelles positions sont populaires ou non, et ce, parmi différents groupes sociodémographiques. La différence ici avec le Parti synthétique – au-delà de la méthode employée – est que cette information est ensuite filtrée par l’humain (conseillers stratégiques et communication, élus et chefs de partis) », ce qui n’est pas le cas du nouveau parti danois, selon M. Ferland.

Une volonté de rejoindre la minorité silencieuse

Au Canada, le Parti Rhinocéros a également été créé par un collectif d’artistes en 1963. Avec un programme électoral farfelu, le parti a pour but de faire un pied de nez au système.

Au-delà du côté burlesque de sa plateforme, le parti a pour objectif une visée qui rejoint celle du nouveau parti danois :  secouer les bases des partis officiels et rejoindre les citoyens qui ne s’intéressent pas à la politique et qui ne votent pas. Sébastien CoRhino, chef du Parti Rhinocéros, apporte que « (son) but est surtout de faire réfléchir les citoyens sur la politique ». Le chef tient également à souligner que « plusieurs politiciens sont heureux que 40 % de la population ne s’intéresse pas à eux. Ils sont ainsi libres d’adopter les lois qu’ils veulent, même si elles sont nocives pour l’environnement, par exemple. »

Que ce soit par un côté plus humoristique ou par un aspect novateur, le but est donc le même : secouer les bases de la politique afin d’intéresser plus de gens à ce qui se passe dans nos institutions officielles.

Est-ce que l’IA saura aller chercher des propositions novatrices pour rallier les citoyens qui se sont détournés de la politique? C’est ce qu’il faudra suivre durant les élections danoises de 2023.

Autres articles traitant de sujets semblables :

Crédit Image à la Une : Vita M sur Unsplash et geralt sur Pixabay