TEDx à Montréal : La toute jeune relève veut inspirer le changement et relever les défis de société

TEDx à Montréal : La toute jeune relève veut inspirer le changement et relever les défis de société

Le programme de conférences TEDx était de passage le 13 janvier à Montréal sous le thème « Apprivoiser l’imprévisible : Comment préparer les jeunes générations aux défis à venir? ». Acteurs de changements, et innovateurs aussi jeunes que 12 ans, ont partagé leurs idées visant à révolutionner le secteur de l’éducation, en pleine transformation.

Promouvoir les femmes en STIM

Si la moitié des conférenciers étaient des adultes, l’autre était composée de la toute jeune relève. Bhavishyaa Vignesh, conférencière invitée âgée de 12 ans, a dénoncé le manque de modèle pour les filles en STIM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques) : « Les filles ont des sources d’inspiration limitées lorsqu’il s’agit de modèles féminins susceptibles de faire naître leurs intérêts dans ces domaines, car il y en a peu d’exemples dans les livres, les médias et la culture populaire. »

Bhavishyaa Vignesh. (Photo : Roxanne Lachapelle)

Elle note que, selon l’UNESCO, les femmes ne comptent que « 28% des diplômés en ingénierie, et 40% des diplômés en informatique », et que, sur le marché du travail, elles ne représentent qu’environ le tiers des employés totaux. Ayant souvent elle-même été la seule fille présente aux événements et projets scientifiques auxquels elle participait, la jeune leader dépeint une réalité propre à bien des femmes faisant carrière en STIM.

Des femmes œuvrant en STIM rapportent se sentir imposteurs en raison des stéréotypes qui pèsent contre elles et contre leurs carrières, qui tendent à évoluer plus lentement que celles de leurs confrères. Le Manifeste à propos des femmes en STIM relève que des « remarques désobligeantes laissent encore supposer que les filles ne peuvent réussir en génie aussi bien que les garçons, qu’elles sont incapables de bien comprendre les contenus autant que la discipline elle-même parce que ce sont des filles (et qu’elles) sont moins manuelles que les garçons. »

L’élève ontarienne démontre que ces biais se glissent dans nos secteurs technologiques, notamment celui de l’intelligence artificielle. Bhavishyaa a demandé à une IAG de générer dix idées de cadeaux pour garçons, et une autre dizaine pour filles. L’outil a suggéré des LEGO d’espace, des jouets de vaisseaux spatiaux et des kits scientifiques pour les garçons, et des maisons de poupées, des poupées Barbie et des animaux en peluche pour les filles. « Si un ChatBot d’IA largement utilisé par des millions de personnes chaque jour est porteur d’un tel biais, alors c’est que nous devons nous adapter en tant que société », a-t-elle lancé.

Enfin, Bhavishyaa suggère qu’un écart de confiance explique cette sous-représentation, alors que les filles ont tendance à être évaluées plus sévèrement en STIM et que plusieurs professeurs transmettent involontairement à leurs élèves une certaine « anxiété mathématique ». Cette pression fait en sorte qu’à compétence égale, les filles perdent plus tôt leur intérêt pour les mathématiques et les sciences que les garçons.

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Le rôle indispensable des parents

Bhavishyaa invite les filles à trouver des modèles et mentores prêtes à les soutenir, à être vocales et à s’affirmer lorsqu’elles dénoncent les stéréotypes qui pèsent contre elles, et à ne pas se laisser dicter leurs choix en fonction des rôles sociaux genrés. La jeune conférencière appelle également les parents à encourager leurs filles à cultiver leurs intérêts, et à sortir de leur zone de confort et des sentiers battus.

La conférencière Yasmine Ben Arous, élève de secondaire 4, conceptrice de l’application web et mobile Calmos dédiée aux troubles anxieux, a insisté elle aussi sur le rôle central des parents afin de faire naître le désir d’innover chez les jeunes : « Soyez cette personne pour un jeune, celle qui partage ses connaissances, qui inspire, parce que sans vous, ce jeune ne pourrait jamais découvrir cette passion, cette flamme. »

Stéphanie Jecrois. (Photo : Roxanne Lachapelle)

Akram Tahar Chaouch, étudiant en Sciences, arts et lettres au cégep André-Grasset, croit en l’importance de la relation bidirectionnelle entre le soutien des parents et les intérêts de leur enfant, mais aussi en les capacités indépendantes et autonomes des jeunes. « J’invite tous les jeunes qui pensent ne pas avoir le soutien nécessaire, à aller chercher par eux-mêmes le courage de le faire, de prendre leurs propres initiatives », a lancé le conférencier.

Faire l’expérience des technologies et de l’innovation à l’école

« Les jeunes sont ingénieux. Ils ont le pouvoir de façonner leur avenir, mais est-ce qu’ils sont bien préparés pour le faire? », se demande Stéphanie Jecrois, co-fondatrice de Technovation Montréal, rappelant que 85% des emplois de 2030 n’existent pas encore. L’apprentissage par l’expérimentation est selon elle la meilleure façon de contribuer à cette préparation. Elle somme les écoles d’agir pour permettre aux jeunes de développer leur autonomie en travaillant sur des projets concrets, entre autres, en mettant des espaces de création et d’innovation à leur disposition.

« Ce sont (les jeunes) qui vont créer les inventions du futur, alors donnons-leur les moyens de créer l’avenir à leur image. Laissons-les expérimenter ! »

– Stéphanie Jecrois, co-fondatrice de Technovation Montréal

Courage, créativité, collaboration, empathie, écoute… telles sont quelques-unes des caractéristiques clés des personnes qui osent innover, croit Luc Sirois, innovateur en Chef au Québec, qui souhaite aussi voir plus d’innovation relevant de l’enseignement dans le système éducatif. « La science du bon développement de l’innovation qui répond à des besoins, qui frappe dans le mile, qui avance à petits pas existe, mais elle n’est pas nécessairement enseignée. Il faut s’assurer de diffuser cette science, ce savoir-faire (…) Ça devrait faire partie de l’éducation de base, du curriculum de formation de tous les dirigeants d’organisation. »

« Les jeunes sont les plus grands agents de changements de notre société. Ils ont la capacité de réfléchir, de développer des idées, de construire un avenir meilleur (…) Ce sont eux qui vont créer les inventions du futur, alors donnons-leur les moyens de créer l’avenir à leur image. Laissons-les expérimenter ! », prône Mme Jecrois.

Croire en la jeunesse

Mathias Pacheco, étudiant au baccalauréat de Computer Engineering de l’Université McGill, valorise la contribution des jeunes innovateurs pour régler des enjeux sociétaux. « Le 21e va être rempli de défis qu’on doit relever ensemble. J’aimerais dire aux personnes qui sont en position de pouvoir d’essayer de créer des groupes, des opportunités pour que les jeunes se rejoignent entre eux (…) pour mener de magnifiques projets qui vont permettre de changer le monde. » L’innovateur en chef du Québec est de cet avis, ajoutant qu’être « ingénieur, ce n’est pas juste être un technologue, c’est une façon de changer le monde ».

« Être ingénieur, ce n’est pas juste être un technologue, c’est une façon de changer le monde. »

– Luc Sirois, innovateur en Chef au Québec

Cette envie de changer le monde a été exprimée par plusieurs des jeunes conférenciers au travers des différents panels : « J’ai envie d’apporter du changement et de motiver d’autres à apporter du changement à leur tour. Si j’avais un message pour les jeunes et les moins jeunes, ce serait de briser les normes (…) Si on veut innover, si on veut créer le changement, il faut qu’on soit différent », estime Mathias Pacheco.

« Adultes, croyez en vos jeunes. Le changement fait peur, on est dans une ère technologique avec des avancées chaque jour, mais je pense que les jeunes sont les plus prêts à contrer les problématiques, tout ce qui relève de l’IA, des technologies, etc. Mais nous sommes aussi très capables de promouvoir tous les aspects positifs qu’elles vont amener parce que, je dirais, nous sommes capables, avec notre nouveauté, notre originalité, de briser les normes déjà établies (…) En nous donnant les moyens d’innover, c’est nous qui serons capables d’apprivoiser l’imprévisible en réglant des problèmes », a soutenu Yasmine Ben Arous.

Crédit Image à la Une : Roxanne Lachapelle

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